Sortir du cauchemar [prio Whitewind]

Elle revoyait enfin le ciel au dessus de sa tête plutôt que des parois de terre tour autour. Mais elle quittait la sécurité de son refuge pour une vision beaucoup plus effrayante. Ses yeux négligèrent bien vite la lumière ambiante, distinguant plutôt les dépouilles qui jonchaient le sol. Elle eut un mouvement de recul, bousculant la patte d'un vivant au passage. Désorientée et un sentiment de détresse l'étouffant, elle jeta des coups d'oeil effarouchés aux alentours, passant de cadavre à marre de sang, puis découvrant le corps toujours aussi imposant d'un sabre achevé. Se sentant coincée de tous les côtés, elle recherchait désespérément une figure familière, assise entassée sur elle-même, les oreilles dans la nuque, se contentant de se tenir hors du chemin des passants. Ses yeux horrifiés au bord desquels s'étaient assemblées des larmes et dont les prunelles étaient réduites à de simple point, s'accrochaient à chaque corps encore debout, cherchant une fourrure reconnaissable. Elle repéra les teintes bien connues de son frère, et déjà eut un poids de moins sur le coeur. Elle le savait toujours vivant puisqu'ils avaient passé presque toute la bataille ensemble dans les tunnels, mais elle était soulagée de voir une figure familière parmi toutes ses enveloppes sans vie.
Ses yeux se décalèrent pour apercevoir une silhouette argentée, encore plus réconfortante et apaisante, et ses pattes la guidèrent avec précipitation et maladresse vers les pattes de sa mère.
- Maman! sa petite voix se brisa dans un sanglot alors qu'elle s'engouffrait dans le réconfort des bras de sa mère se collant à elle avec acharnement, fermant les yeux pour tenter d'oublier les environs aux air de cimetière macabre. Frémissant de tout son petit corps, elle tentait en vain de calmer sa respiration obstruée par la boule formée dans sa gorge.

Elle se réceptionna plutôt mal dans sa précipitation et fut amortie dans les pattes de sa mère et dans le corps de son frère. Son petit corps tout tendu restait accroché au corps maternel tandis que ses yeux restaient fermement clos, fronçant même les sourcils pour tenter de chasser les images. Mais les odeurs ne lui permettaient pas d'oublier quoique ce soit. Cependant, la voix douce eut don de la rassurer, tout comme la lèche de son frère, qui lui fit ouvrir un oeil pour mieux l'observer. Un semblant de sourire ourla le coin de ses lèvres mais s,évanouit aussi tôt lorsque sa vision lui permit de voir au-delà de celui-ci, où derrière se trouvait encore des dépouilles inariennes. Elle tourna sa tête contre les pattes de la dame grise, cachant son visage. Elle sentit soudain sa mère la reculer d'un geste doux du museau et elle dut se résigner à abandonner sa cache pour qu'elle puisse mieux l'examiner.
« Est-ce que tu es blessée ? »
Les oreilles toujours dans le cran, elle leva des yeux piteux vers le visage de sa mère, hochant d'abord avec hésitation puis plus rapidement de gauche à droite pour signaler la négation.
- Et toi ? s'empressa-t-elle de demander, ses yeux glissant du visage vers le cou, les épaules et le reste du corps pour inspecter le pelage de sa mère. Mais elle sentait toujours ce même parfum qui lui était propre et sa fourrure presque impeccable. Ramenant ses yeux dorés vers ceux azurs de sa mère, elle eut une moue triste alors que l'eau s'accumulait au bord de ses yeux.
- Tu m'as manqué. fit-elle avant de retourner camouffler son visage dans les pattes de Whitewind, essuyant du même fait le surplus d'eau.

La présence de la louve grise lui offrait le plus grand des réconforts, et elle parvenait presque à en oublier le décor du dehors. Sa voix était aussi comme une lumière dans les pensées bousculées de Charlie, qui ne la lâchait plus. Cependant, quelqu'un fit son entrée en trombe. Charlie cacha d'abord son visage davantage puis tourna suffisamment la tête dans le poitrail pour apercevoir son aînée du coin de l'oeil. Elle recula la tête, observant sa grande soeur, la détaillant en silence comme elle l'avait fait précédemment avec Whitewind, cherchant des blessures. Lea' semblait pourtant se porter bien à première vue, et la loupiote éprouva un certain soulagement. Sa mère lui demanda, comme elle l'avait fait avec chacun d'eux, si tout allait bien. Maintenant qu'ils étaient tous réunis et que la bataille était enfin calmée, les choses pourraient peut-être s'améliorer. Pourtant, elle ne put s'empêcher de remarquer quelqu'un qui manquait à l'appel. Vérifiant une seconde fois, recomptant, elle releva la tête vers sa mère.
- Où est Lorrenzo ? questionna-t-elle, tournant la tête vers Leanna, observant les deux femelles, ne sachant laquelle pourrait lui répondre. Elle tourna même la tête vers Adrian, appréhendant. Elle n'était pas idiote. Naïve à la limite, mais avec tous ce qu'elle avait vu dehors, une petite voix à l'intérieur d'elle lui criait que quelque chose n'allait pas.

Sa petitre truffe relevée vers les deux femelles, Charlie conservait ce questionnement dans ses yeux, autant par curiosité que par l’appréhension de la réponse. La mort étant un concept qui lui échappait totalement pour l'instant, elle ne pouvait envisager de comprendre la difficulté de la question qu'elle posait. Ce fut sa soeur qui prit la parole la première, évitant de répondre directement à l'interrogation de la loupiote.
« Charlie... Tout ira bien maintenant... »
La mordorée désirait ardemment la croire, mais toujours subsistait l'attente de la réponse à sa question. Puis, ce fut au tour de la louve argent de prendre la parole, les jaunes de Charlie glissant sur elle.
« Écoutez moi.. »
À la demande, la petite releva un peu les oreilles, montrant son attention.
« Je ne pense pas que Lorrenzo revienne parmi nous. » déclara-t-elle.
Charlie continua de la regarder un instant, le temps que l'information face son chemin jusqu'à son cerveau innocent. Ses yeux se firent gros et elle lâcha un petit ''Oh.'' étranglé pour souligner qu'elle comprenait, avant de se blottir plus profondément dans l'étreinte de sa mère, ses yeux se remplissant d'eau alors qu'elle fixait un point invisible, jusqu'à remarquer la présence d'Adrian, levant ses yeux humides vers lui, avant de tourner sa tête dans le poil de sa mère.