Petit nuage du désert. [Prio Sunshine]

Elle était venue au monde depuis si peu de temps. Si peu en fait, qu'elle ne voyait le monde que depuis quelques temps. Elle n'avait que trois semaines après tout. Encore cloîtrée dans la tanière avec ses deux frères, elle passait le plus clair de son temps, bien inintéressant, à se coller à eux ou à attendre le retour de sa mère. Elle n'était sortie qu'une seule fois. Tout ce dont elle se rappelait de cette brève sortie était la lumière, si vive, si étincelante et la chaleur. À la fois absolument insupportable et agréable. Elle ne connaissait pas beaucoup de choses, mais en cet instant, elle savait très bien ce qu'ennui signifiait. Ses deux frères dormaient et elle attendait, patiemment. Elle attendait cette présence familière en qui elle avait la plus totale des confiances et pour qui elle aurait voulu tout faire.

Elle était revenue, finalement. L'attente avait semblé bien longue pour la petite bien qu'il ne se fut agi que de quelques instants. Sentant la présence de sa mère tout près, elle lova sa tête dans la fourrure de l'adulte, s'y blottissant avec affection. Elle ne comprenait pas grand chose au monde, mais elle voulait déjà lui faire savoir qu'elle l'aimait, lui faire savoir qu'elle était là. Ainsi protégée, rassurée et confiante, elle tenta de parler, laissant échapper un vague«M'man», ajoutant un petit coup de tête affectueux pour lui dire je t'aime, mots qu'elle ne connaissait pas encore tout à fait.

Lovée contre sa mère, la petite enfouit sa tête dans sa fourrure, lui faisant un câlin de ses minuscules pattes avant de reculer pour faire face à l'adulte, demandant dans un langage aproximatif:

- Quand 'peux 'otir a'ec toi? Veux dehors. A'ec toi.

Ses mots n'étaient pas complets, ne se faisaient pas toujours sensés, mais elle savait se faire comprendre. Elle voulait découvrir le monde, se promener un peu avec sa mère si elle le pouvait. Sa fourrure toute cotonneuse lui donnait l'air d'un petit nuage, sale à cause de ses couleurs, mais d'un petit nuage quand même. Elle avait de grands yeux émerveillés, aussi bleus que le ciel ou à plus pratique exemple, aussi bleus que ceux de sa mère qu'elle observait avec un espoir manifeste.

«Pas tout de suite Azu. Là,On dors.»

Décue par la réponse de sa mère, la petite coucha les oreilles, faisant la moue avant d'essayer de demander:

- P'quoi? J'pas fatiguée.

Ce devait bien être une de ses plus belles phrases à date et elle en était fière. Elle redressa la tête face à la louve à la longue chevelure. Elle ne comprenait pas vraiment le concept d'heures spécifiques pour dormir. À ses yeux, c'était tout simple; quand on avait sommeil, on dormait et quand on n'avait pas sommeil, on demeurait éveillé.