Déclin.

Déjà, le soleil déclinait peu à peu, la nuit n'allait pas tarder à tomber. Le ciel se voilait de couleurs violacées et orangées, accompagné d'une nouvelle brise, plus chaude que la précédente. La forêt paraissait silencieuse, fatiguée néanmoins observatrice. Alexie, chasseuse Alterone, avait guetté la forêt de sa meute toute la journée afin d'y trouver quelconque proie. Le bilan ? Deux lapins seulement. De retour vers le séquoia couché, elle avait déposé le gibier près de la tanière des Alphas. Fatiguée, elle s'était offert une sieste, donnant le relais à ses camarades chasseurs. Mais le cri d'un faucon la réveilla peu après. Ouvrant un œil puis l'autre, elle se redressa, dévoilant sa fourrure brune et ses pattes immaculées. Elle se secoua rapidement, un air de mépris envers le volatile avant d'étirer touts ses membres. Oubliant apparemment la politesse, elle prit en gueule l'un des lapins destinés aux chefs, trottant vers un coin douillet où déguster son repas.

Couchée avec délice au pied d'un arbre, Calamité regardait passer avec des yeux mi-clos les quelques loups de sa meute qui rentraient au bercail. Pour elle aussi, la journée avait été mouvementé ; courir d'un bord puis de l'autre de la jungle, à la recherche de ses membres éparpillés. Peu à peu, la femelle parvenait à combler le retard qu'elle avait pris quant aux nouvelles de la meute à cause de son affectation au Désert; rattraper le temps perdu, se mettre au courant des informations importantes (et moins importantes) sur la meute était long et fastidieux. Mais elle poursuivait, parce que cela lui tenait à coeur et, en fait, lui était tout naturel. C'était un instinct qui, peu à peu, faisait d'elle une louve à l'aise dans un rôle de commandante, qui l'entourait d'une aura de calme assuré. Et qui, par ailleurs, la gardait active, occupait ses journées de tâches toujours nouvelles et rendait ses soirées paisibles et satisfaisantes. De fait, le repos dont elle profitait enfin succédait à une journée chargée, et c'était pour ces raisons qu'elle pouvait se permettre de se prélasser ainsi.

Cependant, l'inconfort du ventre l'emportait sur sa paresse et fatigue, de sorte qu'elle ne pouvait complètement lâcher prise et sombrer dans le sommeil. Son estomac, après avoir lâché un grognement plus intense, l'obligea à ouvrir les yeux pour regarder aux alentours s'il n'y avait pas quelques morceaux à grappiller. Tomba alors son regard sur une Alexie revenant enfin de son expédition de chasse, avec un paquet de fourrure dans la gueule. Se levant à contre-coeur, mais avec un certain empressement dû à la faim, la louvarde se dirigea aussitôt vers la femelle à la robe noisette. S'asseyant avec détermination aux côtés d'Alexie et fixant avec un peu trop d'attention le lapin qui pendait dans sa gueule, Calamité finit par lui demander :

- Alors, la chasse a été bonne ?

Bonne, la chasse ? Deux lapins pour 11 heures d'inspection de la forêt, pourtant, nombreuses étaient les effluves et bruits suspects. C'est à se demander si elle est digne d'être une chasseuse. En guise de réponse, elle lui montra du bout du museau le lapin déposé devant l'antre des alphas, un regard dépité sur son visage. Alexie avait deviné que la jeune louve attendait une invitation à manger sa proie, et voulait lui faire comprendre qu'elle n'avait qu'à chasser la sienne. C'est pour cela qu'elle ne comptait pas lâcher son butin de la gueule, et se dirigea plus loin, vers une touffe de fougère.

À sa grande surprise, l'air de l'autre femelle se renfrogna, pointa du museau le lapin gisant devant la tanière de Rapier, puis se poussa plus loin. Calamité la regarda faire, surprise, puis reporta son regard sur le lapin délaissé... Malheureusement, il appartenait à la Reine, et la louvarde respectait trop son autorité pour lui voler sa proie. Du coup, elle trotta quelques enjambées pour retourner à la hauteur de la louve brune, qui décidément ne semblait pas de meilleure humeur.
- C'est boon, je te laisse ton lapin.
Elle roula des yeux, tentant de se concentrer sur sa bonne humeur plutôt que sur son estomac. Cela eut comme effet qu'une partie d'elle revint à ses comportements enfantin, c'est-à-dire une bonne humeur parfois trop insistante. De toute façon, elle était décidée à obtenir une parole d'Alexie.
- Mais manger t'empêche pas de répondre ! Alors, c'était comment ?

Une fois allongée dans un coin douillet, elle arracha un bout de chair de lapin avant de l'avaler, puis posa son regard sur Calamité.
- De quoi ? la chasse ? C'était une mauvaise journée, je n'ai pas su rassembler toute mon énergie.
Alexie hésita un instant avant de pousser le petit corps vers la jeune louve, un léger sourire sympathique aux lèvres, histoire de se montrer plus aimable.
- Tiens, on peut partager.

- De quoi ? la chasse ? C'était une mauvaise journée, je n'ai pas su rassembler toute mon énergie.
La louvarde abaissa les oreilles, signe de déception. Sûr qu'Alexie n'avait pas semblé être débordante d'énergie et de joie, mais c'était tout de même triste.
- Ah ? Pourquoi ça ?
Et elle était vraiment intéressée par la réponse. Si quelque chose n'allait pas avec la chasseuse, il faudrait faire en sorte que cela devienne plus positif. Mais avant même de lui dévoiler sa pensée, la louve noisette poussa du museau le lapin, le roula sous le nez d'une Calamité surprise.
- Tiens, on peut partager.
Elle esquissa un sourire, presque timide, heureuse de voir le changement d'attitude.
- Merci.
Sur ce bref mot, elle pencha la tête pour s'approprier l'une des pattes arrières, l'arracha rapidement et repoussa la proie à l'attention d'Alexie. Son estomac resterait sur sa faim, mais c'était déjà sympa de sa part de partager.

• À corbeilliser s'il vous plait, en attendant que Tane revienne !