BADABOUM. Une nouvelle.

PNJ utilisé : Synadena

Synadena s’était subtilement éclipsée de l’ennui des plaines et des festivités. Également, elle s’était habilement dérobée aux yeux experts de sa sœur, qui l’aurait probablement forcée à supporter des heures de lassitude parmi les bipèdes, les chiens et les traîneaux. Certainement, Quidel persisterait à attendre l’arrivée des athlètes ; ainsi, Lana s’était permise l’incruste dans un groupe rentrant au Clan du Loup. Toutefois, le chemin avait était long ; la pauvre fourrure de la chienne n’avait pas survécu au gel. Dès qu’un des abris humains troubla l’horizon, la native du Clan de la Martre en profita pour lustrer son poil. Ensuite, elle admira avec joie l’endroit qui était dépeuplé, abandonné dans certains coins.

Le museau relevé, la truffe vers le ciel, la queue en panache. Synadena trottinait entre les huttes. Elle marchait donc avec légèreté, sans vraiment découvrir le camp, mais plutôt en cherchant des regards familiers. En toute honnêteté, elle s’avoua que Quidel lui manquait. Toutes deux auraient pu explorer le petit village ; or, Synadena était laissée à elle-même sans sa sœur. Cependant, ses pensées s’évanouirent brusquement lorsque, alors même qu’elle dépassait tranquillement un abri humain, un autobus rouge la projeta violemment au sol.

— Oh mademoiselle, pardonnez moi, je ne vous ai pas vu arriver je...

Lana demeura écrasée sur le manteau blanc de l’hiver, trop étourdie pour se mouvoir, trop sonnée pour prononcer une parole. Son esprit lui revint peu à peu, et bien vite, elle eût la force nécessaire pour se relever. La chienne ignora néanmoins l’individu, qui, visiblement, était le fautif, à en croire ses excuses.

— Oh gosh. Jolie chix, minauda l'inconnu.
— Non mais ça va pas ?! s’emporta-t-elle, répondant enfin à son interlocuteur.

La femelle jeta ensuite un regard inquiet à sa toison rose et noire. Soudain, ses prunelles s’élargirent, fixant incessamment sa fourrure souillée. Synadena releva la tête, un air horrifié s’étant glissé sur son visage. Consternée, effarée, elle regarda tour à tour son poil, l’inconnu, puis encore son poil. Enfin, elle sembla reprendre vie, alors que sa truffe se hissa, doucement mais de façon saccadée, comme si elle venait d'apercevoir un revenant, au niveau de celle de l’assaillant.

— Regarde un peu ce que t’as fait ! elle s’enflamma, en désignant sa toison salie.

L’inconnu la détailla, son museau faisant le voyage entre les pattes de Lana et ses oreilles. Néanmoins, il n’ajouta rien, et s’efforça de déplacer un morceau de viande – d’où sortait-il, d’ailleurs, ce morceau ? – d’un endroit spécifique jusqu’aux pattes de la louve du Clan de la Martre. D’abord ébahie, la chienne se rabroua aussitôt, comprenant qu’on tentait de l’amadouer.

— Je suis vraiment navré gente dame. Pourriez-vous me pardonner avec ce met de choix ?

Interloquée, Synadena ne répondit rien, faisant mine de bouder. Elle arborait un air pincé, les yeux fermés. Sa silhouette était droite et hautaine, et sa truffe, légèrement pointée vers le ciel brumeux d’hiver.

— Croyez moi, vous êtes ravissante. Ma brutalité n'a pas suffit à altérer votre jolie minois, semblerait-il.

Les oreilles de la femelle rose et noire pivotèrent vers la direction des paroles qui venaient d’être prononcées. Sa curiosité s’étant attisée de quelque peu, celle-ci s’exerça à délicatement entrouvrir les yeux, en jetant un regard impérieux à l’individu coloré. Ce dernier affichait maintenant un grand sourire. Synadena s’indigna, déstabilisée par le comportement de l’autre.

— Ah non ! Les belles paroles ne marchent pas avec moi, siffla-t-elle, piquée.

Elle piaffa légèrement. Néanmoins, ses traits s’étaient adoucis ; elle se sentait flattée, et ne pouvait pas s’empêcher d’accepter les compliments qui étaient offerts à sa personne. Après tout, l’entretien régulier de sa toison demeurait long et ardu, sans oublier celui de sa tignasse ! S’efforçant constamment à soigner son apparence afin d’être présentable, elle acceptait volontiers les éloges qu’elle méritait.

— Par contre... je ne dirais pas non à ce modeste morceau, elle ajouta, son air altier toujours en place.

Soudain, les pattes de l’inconnu se joignirent dans une foulée, puis dans une seconde, puis dans une autre encore ; il s’approcha d’elle. Cet étranger, s’approchait, dangereusement, d’elle. Synadena se trouvait mal à l’aise, et surtout, scandalisée par ce comportement libertin. Ses oreilles s’inclinèrent vers sa nuque. Néanmoins, le chien vint se poser devant son museau, son regard gris se noyant dans les prunelles de Lana. Un instant, cette dernière demeura subjuguée, trop ébranlée pour réagir. Aussitôt, cet énergumène lui soutira le morceau de viande : elle venait tout juste de tomber dans le panneau.

— Tout compte fait... entama-t-il, toujours aussi inconfortablement près. Je...

Synadena, pincée, le contempla longuement. Vivement, reprenant vie, sa silhouette se recula de deux pas, creusant ainsi un espace plus agréable entre les deux canidés. Elle patienta toutefois pour le reste de la phrase, un air impérial dominant encore ses traits. Cet inconnu était incommodant, mais particulièrement hypnotisant.

— ... vais plutôt attendre que vous vous présentiez, termina-t-il en un sourire narquois.

Les oreilles de Lana se rabattirent de plus belle vers l’arrière, tandis que celle-ci troquait sa prétention pour de la consternation. L’animal rouge lui semblait impertinent ; la native du Clan de la Martre se sentait légèrement prise au dépourvu dans cet environnement hostile.

— Oh comprenez moi, vous pourriez être une espionne venue d'on ne sait où pour faire on ne sait quoi. Je ne peux pas me risquer à alimenter un ennemi. Aussi exquise soit cette ennemie.

Froissée, la chienne détourna son museau vers la gauche, cessant brusquement de pourvoir cet insolant avec son regard digne de plus de respect. Au même moment, un bref soupir d’exaspération s’échappa d’entre ses crocs, en un « hmph! » aïgu. Synadena laissa le silence s’immiscer entre elle et le mâle, espérant que ce dernier change d’avis sans qu’elle ait à s’incliner devant lui. Au Clan de la Martre, au moins, on faisait preuve de considération à son égard.

— J’ai l’air d’une espionne à ton avis ?! Franchement... s’impatienta Lana. Tant pis, je n’ai nul besoin de ton offrande et ni de ton aide ! mentit-elle en jetant un coup d’œil appâté à la nourriture qui lui était à présent interdite. Merci bonsoir ! elle siffla en se retournant.

(Awww c'est trop gentil ♥ Moi aussi, j'adore comment t'écris, t'arrives toujours à me faire sourire xD)

Un bruit de pas organisés en trot léger éveilla Lana de sa contrariété, en effaçant cette indisposition et en la remplaçant par une douce satisfaction. En effet, le mâle rougeâtre venait tout juste de se placer à ses côtés, avec en prime, son dîner – qui, malheureusement, n’était pas encore entre ses crocs à elle. Se félicitant d’avoir dupé, bien qu’indirectement, l’inconnu, elle poursuivit son chemin, sans lui accorder un seul regard. Néanmoins, elle sentait ses yeux qui s’appliquaient à la détailler.

— 'ien chûr que vous avez 'esoin 'e mon aide ! il lui jeta alors, de façon un peu trop joviale pour Lana. Elle s’interdit toutefois de le considérer, mais ses oreilles orientées vers lui la trahissaient. 'e m'appelle Hunter, 'e chui un chien d'attelache, continua-t-il dans un langage approximatif.

Les traits de Synadena s’adoucirent ; il avait cédé avant elle. Cette dernière se permit même d’offrir un sourire à l’inconnu, sa tête pivotant légèrement. Elle découvrit que l’autre arborait déjà un charmant sourire. Cependant, elle se vit barrer le chemin, qui plus est par ce « charmant inconnu avec son charmant sourire ». Lana se raidit, ayant un réflexe qui la fit tanguer vers l’arrière, alors que sa patte avant droite quitta le sol. Bien rapidement, l’agacement reprit sa place sur les traits de la chienne.

— 'ous êtes nouvelle, non ? 'ous venez de quel camp ? l’interrogea-t-il, maintenant truffe à truffe.
— Ee- ! lâcha-elle, consternée. Trop près ! se plaignit-elle en soufflant sur le museau du dénommé Hunter pour qu’il recule. Et trop grand aussi, elle lui annonça enfin, devant se contraindre à relever le museau pour l’observer correctement. Synadena grimaça, impatiente ; elle n’aimait pas se sentir petite. Elle attendait presque que la silhouette de Hunter diminue devant ses yeux, sur demande.

Aussitôt dit, aussitôt fait : Hunter, sans toutefois perdre son air jovial, se rabattit au sol, prenant soin d’allonger tout son corps. Il semblait trouver un certain délice dans le déroulement des péripéties ; délice que Lana ne comprenait pas. Si elle avait à choisir entre roi et paysan, elle ne s’écraserait certainement pas comme un simple villageois. Synadena, visiblement charmée elle aussi, offrit un sourire mêlant satisfaction et fierté au mâle. Elle préférait bien mieux cette situation où elle se sentait détenir le contrôle. Et enfin, son prix lui était presque remis aux pattes.

— Faut-il que me couche sur le dos pour vous implorer une nouvelle fois de me donner votre prénom ? déclara Hunter, insistant, étendu au sol.

Lana fit mine de réfléchir, s’asseyant, en troquant son sourire pour un petit air détaché et dubitatif : il ne fallait bien entendu pas qu’elle se montre trop intéressée par les circonstances. Ses paupières voilèrent son regard, et la chienne releva légèrement la truffe. L’instant silencieux devait faire office d’attente, pour faire languir Hunter. Enfin décidée, ses yeux s’ouvrirent alors, et la native du Clan de la Martre esquissa un sourire indulgent, miséricordieux, accordant sa grâce à Hunter :

— Synadena. Elle lui concéda son nom, sans plus, dans un élan de générosité. Son amabilité n’avait donc pas de fin...! Elle s'étonnait elle-même ().