Drôle de chasse (Prio' Argo)

*Snif snif*

Drôle de petit bruit qui s’échappait de la luxuriante végétation qui abondaient au pied de la canopée, quelques buissons bougèrent, laissant passer à une louve brune dont la truffe était collé au sol et était absorbé par sa recherche olfactive.

Le ventre d’Hélya commençait vraiment à crier famine, bien que pour l’instant les gargouillis s’en échappant soient relativement discrets. La chasse avait beau ne pas être son fort, elle avait peu de chance de trouver à manger autrement.

Elle avait bien essayé de prendre un peu de la viande que les chasseurs ramenaient, elle avait bien attendue que ses supérieurs se soient servis mais même ceux de son rang ne la laissa pas approcher. Rares étaient les moments où elle obtenait un petit bout de viande.

Les lapins ne semblaient pas bien nombreux dans le coin, aussi lui fallut-il de nombreuses heures avant d’arriver à attraper un vieux lièvre pas vraiment du genre très charnu. Cherchant un coin où elle pourrait profiter de sa maigre pitance, elle ne put que sursauter violemment en entendant un bruit près d’elle.
 
-Y’a quelqu’un ? Demanda-t-elle anxieusement.

Un bruit de chute et un couinement dans la végétation la firent sursauté, hésitante, elle décida d’aller voir de quoi il retournait. Passant doucement la tête à travers le feuillage, elle découvrit  un loup aussi famélique que terrorisé.

Ses yeux d’ambre se plantèrent dans ceux d’un bleu très clair du mâle avant d’hocher la tête doucement, compatissante, et de sortir entièrement du feuillage. Posant le lièvre à ses pattes, elle tenta de la rassurer.
 
-Ne vous inquiétez pas, je ne veux pas vous faire de mal, fit-elle doucement. Etes-vous perdu ?
 
Avisant le loup terrifié en face d’elle, Hélya ne put s’empêcher de ressentir un pincement au cœur, il lui faisait douloureusement penser aux membres de son ancien clan.
 
-Je me nomme Hélya, et vous ? Un sourire chaleureux se dessina sur ses babines.

-Non... Dit-il en un souffle.

Les paroles qu’elle avait prononcées semblèrent avoir un effet  calmant sur le mâle qui semblant reprendre un peu confiance, peut-être pensait-il se faire attaquer. Une conduite agressive n’était même pas réellement venue à l’esprit de la femelle, à quoi bon attaquer quelqu’un qui ne vous veut aucun mal ?
 
-Argo... Moi c'est Argo, dit-il un sourire béat aux lèvres.

Le dénommé Argo semblait sous le charme, Chose facilement explicable s’il avait rencontré l’un de ses nouveaux camarades de meute. Alteron posséderait une force qui la rassurait, mais la violence dont faisait preuve la majorité du clan était quelque peu déroutante.
 
-En fait... hm... Oui... Je suis perdu.
 
Même si elle nota la contradiction, elle ne le montra pas, Hélya aurait peut-être réagi de cette manière en d’autres circonstances. La maigreur du mâle lui sauta enfin aux yeux, chose qu’elle n’avait pas pris le temps de vraiment assimiler jusque-là.

-Vous devriez mangez, vous avez du beaucoup marcher et il faut reprendre des forces, dit-elle en poussant le lièvre vers le mâle.

Elle préféra ne pas évoquer directement l’état de santé de son interlocuteur, les mâles avaient souvent tendance à ne pas accepter l’aide d’une femelle sous prétexte de fierté, cela aurait été d’autant plus stupide qu’il semblait vraiment affamé.

Hélya ne put cependant contenir un petit regard protecteur, ils semblaient avoir à peu près le même âge, chose pour laquelle la brune ne put que le voir comme le frère de portée qu’elle avait laissé à son sort sans même tenter de le convaincre de la suivre.

_ Je peux vraiment ?

Le mâle sembla hésiter, visiblement aux prises avec sa conscience aux pensées certainement contradictoires, à la fois méfiant et plein de gratitude. Il trancha cependant bien vite, ne laissant pas le temps à la brune de confirmer.

Le voir manger ainsi était pour elle la meilleure récompense : jamais elle n’avait vu quelqu’un prendre autant de plaisir à manger une proie pourtant bien modeste. Pourtant, il s’arrêta à la moitié, bien que cela semblât lui peser, repoussant le reste vers elle.

_ C'est à vous... Merci... Merci infiniment.

Le regard qu’il lui lançait l’émue, tant de reconnaissance pour ce simple geste … elle avait du mal à comprendre. Son frère aurait-il réagi de la même manière si elle l’avait aidé ? Elle en doutait. La gratitude d’Argo était, elle, bien réelle.

-Ce n’est rien,  sourit-elle doucement. Je suis heureuse d’avoir pu partager cette proie avec vous… je connais malheureusement les aléas de la vie de solitaire, vous êtes bien courageux pour vivre ainsi… personnellement, je n’aurais jamais eu la force de survivre sans une meute…

Elle pencha la tête, gênée, les brefs mois passés en solitaire l’avait terrifié. Sa rencontre avec Seth et son acceptation au sein de la meute d’Alteron était donc une bénédiction pour la naïve brunette.

Epuisé. Le mâle semblait à bout de force, comme si toute son énergie était employée à survivre. C’était surement le cas, Hélya se rappela les difficultés à rester en vie et manger à peu près normalement durant sa demi-saison passée en solitaire.
 
_ La force, je ne l'ai plus... Il s'arrêta la tête basse puis soudain, lança avec rage, Et je ne l'ai JAMAIS eu. Il frappa le sol, tressaillit puis respira à fond, avant de relever la tête vers elle.

Le brune n’en menait pas large, le remord s’étant enfin fait un chemin à travers son cœur après ces mois où elle n’avait pensé qu’à elle. Mais quel remord ? Elle voyait seulement Argo comme ayant pu être son frère, c’est envers le mâle qui lui faisait face qu’elle était compatissante. Son frère, elle ne l’avait jamais vraiment considéré comme tel, et c’était réciproque.
 
-Je sais, murmura-t-elle avec douceur. Mais vous n’avez pas abandonné malgré tout… vous faites en sorte de survivre, vous ne vous laissez pas aller en attendant la mort comme certains… je pense que c’est cela le vrai courage...
 
Elle lui adressa un petit sourire chaleureux, oui, elle le trouvait vraiment courageux. Céder à la facilité était tellement facile, cela avait couté la vie aux siens, se battre pour survivre était beaucoup plus ardu. Même si le résultat ne semblait pas très probant, la volonté y était, on ne pouvait le nier.