L'espoir fait vivre.

Elle s'attendait à ce qu'il lâche la chose du regard, qu'il vienne vers elle, qu'ils partent loin d'ici... Mais Elias semblait incapable de bouger. Ses yeux étaient toujours rivés sur la carcasse nauséabonde. Farah plaqua les oreilles en arrière, suppliant son ami du regard. Partons... Je t'en prie, partons...

- J-je...Je peux pas bouger...
Finit par répondre Elias, d'une voix qui laissait deviner son effrois. En voyant son ami s'effondrer soudainement au sol, Farah ne put s’empêcher de lâcher un couinement étouffé. Elle prit son courage à deux mains afin d'aller porter secours à son ami. Tant pis pour la carcasse ! D'un bond adroit, elle le rejoint tout en essayant de ne pas croiser la monstruosité du regard. La petite louve se tapit près de son ami et chercha à voir s'il était encore conscient. Heureusement, oui. Il lui demanda même une chose dont elle ne se serait pas sentie capable, jusqu’à maintenant.

- T-tu peux me tirer jusqu’à la m-maison ?

Sans trop réfléchir, Farah hocha vivement la tête. Elias s'était mis à pleurer. Elle ne pouvait pas le laisser la, elle ne pouvait pas... Et même si cette chose la terrorisait, si elle doutait de ses forces, elle ne partirait pas sans l'avoir emmené, ou trainé, s'il le fallait.

- S-S'il te plait...

- D'a-D'accord...
Fit elle, sanglotante. Elle chercha alors comment le tirer sans lui faire mal, et opta pour la peau du cou. C'était ainsi que l'on transportait les nouveaux nés, alors ça ne devait pas être très sensible. Doucement, elle approcha son visage de l'encolure du petit brun.

- D-dis moi si je te f-fais ma-mal...
Ses crocs attrapèrent fermement la peau d'Elias et elle tira de toutes ses forces pour le trainer en arrière. Dans son effort, Farah se promit de ne faire aucune pauses tant qu'ils n’étaient pas sortis des broussailles. Le corps d'Elias commençait à peser, si bien qu'elle parcourut les derniers mètres avec difficulté. Épuisée, la petite femelle s'arrêta. Elle relâcha Elias et reprit son souffle. La carcasse, les mouches... Elles étaient loin deux à présent. Les pattes lourdes, la petite louve se laissa tomber au sol. Elle lança un regard vers Elias et alla coller sa tête contre l'épaule de celui-ci.

- C'e-c'est, f-finit...

- Nooon...
En écoutant les gémissements de son ami, Farah sentit son ventre se nouer d’avantage. Elle frotta doucement sa tête contre l'épaule de celui-ci, tachant d’apaiser ses propres pleurs. Il devait bien y avoir un moyen de ne plus penser à la carcasse, mais lequel ? Chacune de se pensées étaient parasitées par l’abomination. Et à l'entendre, Elias devait ressentir la même chose. L'idée lui vint de se concentrer sur des souvenirs agréables. Elle ferma les yeux et repensa à la fois ou elle s'était amusée avec Salama et Elias.

- E-Elias ? Tu te souviens... Tu te souviens quand on avait joué avec Salama ? La petite louve s’efforça de sourire.
- On c'était bien amusés... Essaye de p-penser à ça.

- D-d'accord...

Farah renifla, se concentrant sur la chanson qu'Elias venait d'entonner.

Il s'est rien passé...
Rien du tout....
On a rien vu , rien entendu... ~ ♫

Les paroles étaient simples, mais très efficaces pour oublier tout le reste. La petite louve trouva même la voix de son ami très agréable à entendre.

Rien du tout.
Rien du tout...
On a rien vu ! ~ ♫

Ne voulant pas que la chanson s'arrête, Farah reprit d'une voix douce.


Nous sommes fatigués.
d'avoir tant joué.
On a rien vu.
Rien du tout.
La journée et belle.
Le soleil est tel.
Une grande fleur orangée ~ ♫

Grâce à la chanson, les pleurs des deux jeunes s'étaient presque arrêtés. Ils avaient put se concentrer sur autre chose pendant l’espace d'un instant. Soudainement ramenée à la réalité par un mouvement d'Elias, Farah se décida à redresser la tête. Elle fut d’abord éblouie par le soleil, et put difficilement distinguer le visage souriant de son ami. La petite louve lui répondit en faisant de même, juste avant d'être interrompue par une ombre inquiétante. Farah leva les yeux au ciel, plissant légèrement ses paupières. Un énorme vautour décrivait de larges cercles dans le ciel, certainement à la recherche d'une proie à dévorer. Elle suivit le volatile des yeux jusqu’à ce que celui-ci se pose finalement près de la carcasse. Le corps de Farah fut parcourut d'un frisson.

- F-Farah...C'est quoi ce truc ?
Le questionna Elias. Étonnée qu'il ne connaisse pas déjà cet oiseau, Farah tourna le regard vers son ami. Elle lui répondit donc d'un ton aussi discret.

- Je crois que c'est un oiseau... Un charognard.

Aussi stupéfaite qu'effrayée, Farah suivit son ami de regard. Qu'est ce qui lui prenait tout à coup ?! Il s'était élancé à travers les hautes herbes, aboyant comme un guerrier téméraire. Malgré ses jappements aigus, son assurance ne faisait pas l'ombre d'un doute. Le vautour n'était malheureusement pas prêt à se laisser impressionner par un louveteau: Il ouvrit ses larges ailes pour arrêter Elias dans son élan. Farah s'était relevée sans s'en rendre compte, tendit que son ami revenait vers elle au pas de charge. Elle se demanda si un tel oiseau était capable d'enlever des louveteaux, mais elle n'allait pas prendre le risque de vérifier. Lorsque Elias la bouscula dans sa fuite, elle ne se fit pas non plus prier pour le suivre.
- COURT FA' !!! IL VA NOUS BOUFFER !

Le cœur battant, la petite suivit son ami. Ils arrivèrent rapidement à l'ombre d'une tanière, dans laquelle elle s’effondra. Les événements de la journée l'avaient épuisée. Farah sentait que ses pattes étaient lourdes de fatigue. Elle se déplaça lentement jusqu’à l'une des parois de la tanière, et y posa la tête.

- Je crois que je vais dormir un peu Elias... Ne t'en fais pas pour les vautours, je ne pense pas qu'ils nous attaqueront.