Fêlure d'une carapace vide.

Mammifère

Mi-Hiver An 6 ~ Les profondeurs de la jungle ~

Poison.
Peut-être bien le seul nom encore capable de le faire trembler comme un louveteau.
Louveteaux.
De nouveaux louveteaux pour sa mère. Pour son père.
Pour la première fois depuis des saisons, Désastre se sentait chamboulé, instable. Craignant ses propres émotions, alors même qu'il se sentait (et se savait) seul sans sa soeur pour modèle et référence, il s'était empressé d'aller se réfugier au plus profond de la vieille forêt humide, là où si peu de ses congénères s'aventuraient.
Il tremblait. De rage, de peur, de jalousie ? Il n'en savait rien. Mais ce fut suffisant pour qu'il choisisse de se rouler en boule dans un fourré, laissant largement traces de son passage en s'y frayant un chemin avec violence.
La pénombre le réconforta, camouflé dans les ombres, seuls ses yeux rouges dénotaient, fixant devant lui alors que ses oreilles faisaient tout le travail de garde.
Peu à peu, ses tremblements diminuèrent. Il parvint à fermer son esprit à toute émotion, se figeant telle une statue, tentant soigneusement de réparer la fêlure de sa carapace.
Autant dire que la perspective d'être grand frère n'était pas une nouvelle à laquelle il s'était attendu...

*So Feminist*

Elle avait renoué avec sa meute. Retrouvés certains contacts (s'était moqué à quelques reprises de Digg), répondu à certains doutes à son sujet, redressé un peu sa crédibilité.. C'était un processus plus lent qu'elle ne l'aurait cru, car si certains, l'esprit aussi léger que leur permettait la jungle, accueillait bien son retour, d'autres dégageaient plutôt de l'indifférence, voir de la haine. Au moins, des êtres chers à son coeur comme Robin et Brushfire n'avaient nullement caché leur joie de la retrouver. Mais pour d'autres... Elle n'avait toujours pas réussi à mettre la patte sur son frère ou Gun, et Shrew semblait se volatiliser chaque fois qu'elle s'approchait d'elle. Certes, ils avaient leur raison, et elle avait longuement douté de ce qu'elle pourrait dire à ceux qu'elle avait abandonné.. Mais à force de jouer au chat et à la souris, les propos qu'elle tournait en boucle dans sa tête avaient finit par mariner à fond et s'étaient dissous. Là, elle était simplement irritée, enfin, dans la mesure où il lui tardait fortement de voir ces trois personnages et que nuls ne semblaient saisissable.

Lorsqu'elle aperçut un chemin violemment tracé dans les bois, elle fut d'abord surprise. Un ours s'était-il introduit sur le territoire ? Ses sens en alerte pour le découvrir, elle ne tarda point à reconnaître une odeur on ne peut plus familière.. Et s'élança aussitôt sur sa trace. Elle le trouva au fond d'un fossé, si discrètement roulé en boule du haut de sa grande stature et de ses couleurs marines. La situation incongrue de le trouver ainsi lui traversa brièvement l'esprit, mais elle ne voulu pas s'y attarder : son désir de le revoir était plus important que s'inquiéter sur sa personne. Cal bondit donc à son tour dans le creux et se jeta sur lui, profitant qu'elle l'ait enfin trouvé pour l'immobiliser entre ses pattes.

- A-- AAAASTRE !!

[CALAMITÉ used TACKLEHUG ? ._. ]

Mammifère

Ses oreilles mobiles captèrent le froissement des feuilles sous les pattes d'un congénère et, automatiquement, son regard rubis se mouva dans cette direction, mais il resta autrement parfaitement immobile.
Bien mal lui en prit car il se retrouva soudain bousculé, et ce n'était pourtant pas donné à n'importe qui d'être capable de bousculer sa masse de muscles !
Un cri accompagna "l'attaque", et Désastre se sentit se hérisser des oreilles au bout de la queue.
- A-- AAAASTRE !!
Paralysé, autant par la présence de sa soeur que par la force qu'elle déployait pour le tenir, le crocodile ne pouvait que réagir violemment, ainsi acculé sans possibilité de fuite. Ses babines se retroussèrent, découvrant ses longs crocs encore assez blancs.
Dans un grognement hargneux, il se força hors de l'étreinte de Calamité, reculant prestement. Son visage se détendit, redevenant lisse et définitivement décoré de ses cicatrices.
Il baissa la tête, observant la femelle beige comme s'il la voyait pour la première fois, le coeur battant de plus en plus vite alors que son instinct de préservation bataillait avec le lien profond qui l'unissait à sa soeur. L'effroi de son attitude envers elle faisait alternativement place à sa colère, faisant luire ses yeux d'émotions variantes.
Un étrange gargouillis sortit de sa gorge, dénotant sa détresse et son incertitude face à la situation.

*So Feminist*

Son frère réagit vivement à sa présence.. Mais bon. Cela était à prévoir : elle lui avait sauté dessus, le surprenant avec brusquerie, et Désastre n'était pas de ceux à prendre les surprises agréablement. Surtout pas lorsqu'il était roulé en boule dans un fossé, par une personne qui l'avait abandonné et avait disparu depuis plus d'un an... Mais cela ne traversa pas l'esprit de Calamité, du moins, pas tout de suite. Lorsqu'il grogna et dévoila les crocs, elle ne s'en fit aucunement, resserant son emprise le temps que Désastre constate que ce n'était qu'elle. Justement : Désastre le constata, et cette nouvelle ne fit rien pour le calmer. Il se propulsa hors de son accolade : cette fois, c'était sa soeur qui était déstabilisée. Elle chuta contre le sol et se releva dans un grognement, essuyant prestemment la boue qui était venue lui coller au visage - Ciel qu'elle détestait cela. En relevant la tête, elle put voir que le crocodile s'était enfin calmé.. Enfin. En apparence seulement. Il la dévisageait, les traits bien plus expressifs qu'il n'avait été donné de lui voir, depuis sa naissance (ou presque). Il gromela quelque chose et Calamité fronça des sourcils, de plus en plus intriguée par le comportement du bleuté.
- Relaaaxe frangin, s'exclama-t-elle avec un peu trop d'énergie, c'est moi !

Mammifère

Visiblement aveugle à la rancoeur de son frère, Calamité le fixa avec perplexité.
- Relaaaxe frangin, c'est moi !
Désastre continua de la fixer, immobile et en proie à une trouble grandissant qui fit de nouveau gonfler sa fourrure rêche et déjà hirsute.
Le fait que la louve beige se comporte comme si rien ne s'était jamais passé ne fit qu'alimenter sa hargne, le décevant profondément. C'était comme si tous ses efforts pour la retrouver n'avaient vraiment aucune valeur. Son visage balafré se plissa sous le coup de la colère et ses pattes le démangeaient de sortir au plus vite de cette inconfortable rencontre.
Ses cicatrices semblèrent fourmiller, probablement par l'afflux du sang à sa tête, mais Astre agit sur ce phénomène instinctivement, se retournant brusquement pour s'éloigner de cette présence trop douloureuse pour sa carapace déjà ébréché par la nouvelle...

*So Feminist*

Désastre demeurait immobile, mais son corps frétillait, tremblait. Désormais inquiète, Calamité fit un pas vers lui ; au même moment, son frère tourna brusquement les talons, la laissant en plan. Elle resta figée, bouche-bée pendant quelques secondes, puis un surplus d’adrénaline lui vint et elle se précipita à la suite de Désastre. Elle n'eut pas de difficulté à le rattraper, mais, comme il continuait toujours, n'osa pas lui couper le chemin pour l'arrêter. Il avait déjà fort mal réagit à son "attaque" surprise.. C'était à trouver une régularité fort inquiétante dans tout cela.
- A-Astre ! L'appela-t-elle, sa voix tremblant légèrement.
Est-ce que ses craintes s'étaient réellement concrétisées ? Elle ne voulait pas le croire. Que son père se sente trahit, heureux mais mitigé de son retour, soit : elle ne l'avait point averti. Mais Désastre ? Leur relation avait toujours été fusionnelle. Elle n'avait jamais eu à le questionner, et vice-versa. Elle lui avait dit de rester ; mais il était tout de même parti.. non ? C'était ce que son père lui avait dit. Et les balafres sur son visage en démontrait. Mais elle ne l'avait jamais voulu, elle avait seulement cherché à se protéger et le protéger tout autant ! Leur lien d'autrefois avait-il était détruit par cette absence, cette.. cette erreur ? Blade lui avait fait comprendre les implications de son départ, autant par ses paroles que sa rétrogradation. Mais elle avait une autre leçon à apprendre... Était-ce le rejet de ceux qu'elle avait aimé ?
- Astre, gémit Cal, parles moi.

Mammifère

- A-Astre !
Elle le suivait et le trémolo dans sa voix lui fit rabattre les oreilles tant ce qui se dégageait de sa soeur par sa faute lui parut anormal. Mais sa colère, sa rancune... sa jalousie l'enveloppaient encore trop pour qu'il se retourne vers elle comme si de rien n'était. Il baissa les yeux au sol, tendant la nuque pour se rapprocher du sol dans lequel il aurait aimé s'enfouir pour échapper à la persistance de Calamité et à sa honte mêlée au reste de ses émotions plus brutes.
- Astre, parle moi.
Un geignement soufflé comme un hurlement s'échappa de sa gorge alors qu'il bifurquait, essayant de la semer.
- Laisse-moi. Répondit-il d'une voix écorchée, les oreilles si rabattues qu'elles semblaient disparaître dans sa fourrure hirsute.
Prudemment, il jeta un coup d'oeil peiné et plissé par-dessous son épaule

*So Feminist*

Il grogna et tenta de s'éloigner, bifurquant lorsqu'il comprit qu'elle arriva à son niveau, mais Calamité bifurqua tout aussi vivement.
- Laisse-moi.
Elle sursauta à l'entendre parler - après tout, elle n'avait pas entendu sa voix depuis si longtemps -, puis fut prise au dépourvu par son ton et ses paroles. Mais il verbalisait ce que son langage corporel disait, depuis le début. Désastre avait les oreilles couchées contre son crâne, et à présent, elle aussi. Il fit mine de la regarder, de sonder si elle était encore là.
- Non !
Elle gronda à son tour, fronçant fortement des sourcils. Ses propres sentiments s'intensifiait, rendant ses propos proche de la colère.
- J'vais plus le faire. Jamais !

Mammifère

Prudemment, il jeta un coup d'oeil peiné et plissé par-dessous son épaule.
- Non ! Gronda-t-elle, bien loin de le laisser en paix comme il l'espérait. J'vais plus le faire. Jamais !
Ce fut à son tour de tressauter. Ou plutôt, un spasme musculaire traversa son corps un bref instant, crispant ses membres et son dos, l'obligeant ensuite à se détendre complètement.
Il détourna le regard, dos à Calamité. Ses oreilles toujours rabattues témoignaient de sa gêne. Son coeur battait à ses tympans et il se sentit étendre ses griffes dans l'humus, cherchant à se stabiliser à quelque chose de primaire, comme lui.
Il ouvrit la gueule, restant ainsi, béant, quelques secondes.
- Tu l'as fait une fois. S'échappa de sa gorge enrouée par la tension de ses émotions.
Son moignon de queue s'agita faiblement alors qu'il trouvait finalement le courage de se retourner vers sa soeur, dévoilant ses yeux où brillaient la peine, le sentiment de trahison et l'indignation.
Il fit un pas ferme dans sa direction, s'ancrant ainsi à la terre pour la poignarder du regard, la forçant à faire face à ce qu'elle avait causé.

*So Feminist*

Désastre s'arrêta. Il lui faisait toujours dos, mais c'était déjà un point pour elle. Il tressaillit, et elle pouvait sentir son instabilité. Le silence restait, mais pour une fois, elle ne le remplit pas. Si Astre s'était arrêté, c'était peut-être qu'il allait lui parler, à nouveau. Peut-être qu'il rassemblait son courage ? Elle déglutit, son corps pareillement figé. Dans l'attente.
- Tu l'as fait une fois.
Le verdict, comme elle s'y était attendu, était tombé. Elle cilla, encaissant physiquement le coup. Désastre se retourna, et elle entrouvrit la bouche dès qu'elle le vit, sans pouvoir piper mot. Son visage, balafré.. Son regard qui bouillonnait d'émotions. Il fit un pas vers elle, plus ferme qu'elle ne l'avait jamais vu, comme s'il avait réussi à tout canaliser son attention sur elle. Elle recula, instinctivement. Oui, il avait bien transmis ses émotions, sa pensée ; ses accusations. Pleurer n'était pas une habitude chez elle. En fait, c'était une coutume qui lui était totalement étrangère. Mais à cet instant, ses yeux s'humidifièrent tout naturellement, comme son coeur se serrait.. d'une émotion plus poignante que tout ce qu'elle avait vécu dans la dernière année, justement par sa douleur.
- Je sais, elle avoua, d'une voix étranglée. Et j'suis désolée.
Se retrouver face à face avec les conséquences de ses actions ne pouvait que l'empêcher de fuir à nouveau. Elle évitait de penser à sa vie, à ses choix, à son passé, principalement pour se protéger. Elle faisait face à ce qui arrivait avec le sourire, une énergie retrouvée, parce qu'elle n'avait pas le choix : c'était son moyen de ne pas s'effondrer. Et depuis la mort de Zéphyr, son aveuglement avait cessé, et elle était devenue plus saine. Sa vie se remettait en ordre, sa tête aussi. Mais elle continuait de fuir certaines choses. Certaines responsabilités.. Son frère. Ses paupières papillonnèrent, tentant de chasser l'eau. Elle reprit, de la même voix rauque :
- J'le r'ferai plus.

Mammifère

Les yeux de Calamité semblèrent briller anormalement après son maigre texte et Astre observa le phénomène avec un esprit bizarrement détaché mais où flottaient quelques grains de curiosité et de perplexité.
Lui non plus n'était pas familier des larmes. Il en était même si étranger qu'il fixa longtemps sa soeur sans comprendre ce qu'il se passait.
- Je sais, elle avoua. Et j'suis désolée.
Un craquèlement virtuel se fit entendre du côté de Désastre. et sa position ferme et stable sembla perdre de sa constance et s'affaisser de quelques millimètres.
Surpris, voire effrayé, par ce nouveau sentiment de perdre le contrôle de lui-même, ce fut à son tour de faire un pas en arrière. Son regard baissa en intensité, gagnant des lueurs d'incertitude et de culpabilité.
- J'le r'ferai plus.
Nouveau craquement, alors que Désastre considérait cette promesse avec une amertume mêlée d'espoir qui ne fit que le confondre d'avantage.
Un grognement rauque sortit de sa gorge tandis qu'il baissait les yeux, fronçant ses paupières en griffant le sol par la seule crispation des ses phalanges.
Un nouveau craquellement et sa carapace se fendit, le faisant s'effondrer, tant physiquement que psychologiquement. Son postérieur rencontra le sol alors qu'il fixait toujours le sol, s'inclinant devant ce lien trop fort qui en avait toujours fait le premier et meilleur subordonné de sa soeur.
Dans sa tête, la scène était bien moins calme, en revanche, chaos de doutes, d'espoirs et de désespoirs, il se sentait ramené à son identité primaire de jeune louveteau vulnérable, bien loin de sa stature de mâle imposant et de surnom de crocodile.

*So Feminist*

À chacune de ses paroles, un tressaillement faisait bouger le corps de son frère, le fissurant. Il recula, à nouveau, mais cette fois ne pouvait s'enfuir. Pas plus qu'elle n'aurait pu le faire, ou se jeter sur lui.. Leur lien actuel les empêchait autant de se séparer que de s'unir. Mais cet état de fait n'était pas pour durer. Désastre échappa un grognement, encore, le corps crispé. Sa soeur maintenait son regard sur lui, les crocs serrés de par l'émotion. Et le crocodile céda. Son séant était posé au sol, sa tête abaissé entre ses épaules. Le coeur de Calamité eut un nouveau serrement, à le voir ainsi, incertaine de savoir si cette reddition était complètement positive. Elle eut une inspiration, un temps de suspension, puis s'approcha avec lenteur, presque avec crainte. Elle s'arrêta à quelques centimètres de lui et, avec la même appréhension, allongea le cou pour venir poser son museau sur le dessus de sa tête.

Mammifère

Perdu dans ses songes violents, il perçut tout de même l'approche de sa soeur, laquelle à chaque pas semblait apaiser un peu plus les tourments de son esprit.
Lorsqu'elle posa son museau sur son crâne, il baissa instinctivement la tête, docile, alors qu'un soupir libérateur le quittait.
Astre ne bougea plus, mais son immobilité n'était plus rigide, c'était un calme serein : il reprenait la place qui lui revenait auprès de Calamité, et Calamité reprenait sa place auprès de lui. Peu importait le passé désormais.
Pardonnée ?
La notion de pardon était sans doute trop vague pour Désastre pour lui permettre de l'utiliser avec justesse. Mais quoi qu'il en soit, les choses étaient revenues à leur juste place, comme des pièces d'un puzzle qui se heurtent à vouloir se caler au mauvais endroit et qui finissent par trouver leur place unique pour enfin former un tout harmonieux.
Le crocodile ferma les yeux, la tête dirigée vers le sol en attendant le prochain geste de sa soeur.

*So Feminist*

Réceptif à sa venue, il baissa sa tête, et une expiration échappa ses lèvres. Le soulagement vint l'envahir et elle souffla à son tour, raffermissant par le même fait le contact contre son frère. Le sentant enfin détendu, Calamité demeura lovée contre lui le temps de quelques respirations. Puis, étant émotive à sa façon, mais sans trop s’épancher, elle finit par se décoller, lui donnant un bref coup de tête pour rompre leur accolade de manière plus optimiste. La brunette se décolla ensuite et s'ébroua, affichant un petit sourire en coin.
- Alors, tu faisais quoi de bon ?

Mammifère

Calamité finit de sceller leur réunification en se séparant de lui avec un dernier coup de tête comme contact, et elle se recula, permettant à Désastre de redresser le buste pour l'observer d'un regard bien plus calme, mais toujours quelque peu sur la réserve.
- Alors, tu faisais quoi de bon ?
Il la fixa, clignant des yeux alors qu'un ange passait, un point d'interrogation se dessinant bientôt en couleurs néons au-dessus de sa tête.
Ses oreilles tordues s'agitèrent, comme des antennes de radio qui essaieraient de capter un signal invisible. Lorsqu'elles se figèrent de nouveau en direction de sa soeur, une lueur de compréhension brilla dans ses prunelles rouges, aussitôt anéantie par le poids qui l'avait accablé avant que Calamité ne vienne l'en déranger...
De nouveau, ses oreilles se tournèrent vers l'arrière, et sa nuque ploya.
Le crocodile tenta tant bien que mal de rassembler ses idées pour exposer de manière, à peu près, cohérente le fil de son trouble.
- ... Blade... et Poison... Articula-t-il comme un rouage rouillé.
Se détacher de l'attachement familial, en se référant à leurs noms propres, se révéla être une excellente façon de conserver un masque de neutralité, tendue certes, mais bien mieux que son état vulnérable de plus tôt.

*So Feminist*

Lorsque l'expression de son frère se modifia, elle s'alarma. Son coeur s'emballa rapidement, de peur qu'il ne revienne sur leur précédent échange et ne la rejette. Mais les sentiments négatifs de Désastre ne provenaient pas de là.
- ... Blade... et Poison...
Si le premier nom l'avait à nouveau inquiété, car elle avait redouté que quelque chose de grave ce soit produit, le deuxième lui amena un froncement de sourcils d'incompréhension. Son frère n'était pas bien loquace, et elle y était habituée, mais niveau compréhension, ce n'était pas ce qui était le plus facile.
- Que.. qu'est-ce qu'ils ont ?
Elle le fixa, babines plissées, cherchant à creuser du regard ce qu'il voulait lui confier. Mais elle n'était plus aussi naïve qu'avant. La construction de la phrase n'avait manquée de la faire tiquer, mais.. non, il ne pourrait avoir fait cela ! Ce devait être autre chose, un coup bas qu'avait fait Poison, une nouvelle fois.

Mammifère

L'étonnement remplaça un instant son mur facial : elle ne savait pas ?
Pourtant, les deux protagonistes ne s'en cachaient pas. Et même si une annonce officielle était attendue pour confirmer les rumeurs, même Désastre était au courant.
Rudement mis au courant par le biais des commères de la meute, bien entendu. Il lui avait fallu du temps avant de comprendre ce qu'ils insinuaient, et avant de le croire. Pour cela, il avait pris un court instant pour épier Poison. Bien sûr il était encore trop tôt pour que cela soit vérifiable visuellement, alors il avait dû attendre que les propos de sa génitrice la trahisse. Ce qui ne fut pas long compte tenu de la nature capricieuse de la louve.
Horrifié, c'était pour cela qu'il avait fui jusqu'au fin fond de la vieille forêt, loin des murmures qui relayaient la relation renouée du Roi et de son ancienne favorite.

- Que.. qu'est-ce qu'ils ont ?
Désemparé à l'idée qu'il allait devoir lui annoncer, Astre sentit ses yeux s'agrandir et sa gorge se refermer.
Malgré tout, il ouvrit la gueule dans un torrent de gargouillis et grommellements inintelligibles.
Il la referma, enfonçant son menton vers son poitrail, cherchant les mots.
- On va être remplacés... Finit par se frayer un chemin jusqu'à sa gorge, dans un souffle, annonçant la nouvelle sous la forme de l'angoisse qui l'avait fait fuir.

*So Feminist*

Désastre gargouilla des sons, ce qui n'avait rien pour la rassurer : lorsqu'il grommelait ainsi, c'était bien que quelque chose le troublait et qu'il n'arrivait à en trouver les mots. Il réussit tout de même à larguer l'information :
- On va être remplacés...
Cette fois, il ne pouvait plus y avoir de doutes.
- Comment... Comment il a pu.
Ses mots étaient entrecoupés, autant sous le choc que sous sa mâchoire serrée. Elle était pourtant fort mal placée pour juger. Autant niveau amour que loyauté que descendance. Blade avait tous les droits, autant par son titre que parce qu'il ne lui devait rien (au contraire). Mais cette idée, cette trahison (c'en était une, après ce que Poison leur avait fait), la chavirait. Elle cracha, le regard fixe :
- Avec elle.

Mammifère

— Comment... Comment il a pu. Avec elle.
— _{Ha ha hah...} Vous êtes plutôt mal-placés pour critiquer son choix, tout les deux, répondit alors une voix depuis les ombres, précédée par le murmure d'un rire. Après avoir remué les épaules, il pencha sa tête en l'inclinant.
— Princess, et en se tournant vers Désastre, Prince.

Mammifère

- Comment... Comment il a pu. Avec elle.
Face à la rage de sa soeur, Astre baissa les oreilles. Il partageait son désarroi, bien sûr. Même s'il était bien moins haineux que chamboulé et inquiet. Et jaloux.
Pas tellement de l'affection de son père, mais au contraire de celle de sa mère. Affection qu'il avait recherché pendant toute sa jeunesse, malgré les cuisantes remises à sa place de Poison. Il avait fini par se faire une raison, certes, mais la venue de cette nouvelle portée le rongeait : auraient-ils le droit à de l'affection maternelle, eux... ?

Mais bien vite, son esprit torturé se mura de nouveau dans le silence alors qu'à ses oreilles résonnait la voix d'un individu qui n'était pas le bienvenu :
- Ha ha hah... Vous êtes plutôt mal-placés pour critiquer son choix, tout les deux. Princess, Prince.
Les yeux sanguins du prétendu "Prince" se posèrent sur le loup violet. Un instant de silence total passa avant qu'Astre ne retrousse les babines et le museau sur une expression de menace comme il en proférait rarement. Son échine se gonfla, se hérissant de pics, et un grondement sourd émana des tréfonds de sa gorge.
Lui.

*So Feminist*

Une odeur se fit sentir, qu'elle pouvait si facilement reconnaître entre mille, pour avoir passé toute sa vie avec lui. Peu de temps après, la voix de Gun se fit entendre et il apparu, ayant visiblement écouté leur conversation. Elle tourna la tête vers lui, mitigée dans son contentement de le revoir, après son départ sans trop d'explications et le fait qu'il l'ait "fuit" pendant près d'une saison. Qui plus est, sa phrase n'était pas des plus agréables, ce qui amena un froncement de sourcils sur sa mine. Désastre, à ses côtés, fut moins tolérant et retroussa les babines d'un grognement sourd. Il ne l'avait jamais porté dans son coeur, alors depuis qu'il avait "enlevé" sa soeur puis à présent s'incrustait dans leur retrouvaille.. Elle-même n'était pas si sûre d'être heureuse de le revoir, s'il abordait cette attitude.
- Et toi pour nous critiquer.. Posa-t-elle en haussant légèrement les épaules.
Après tout, il avait pareillement fuit, sans son influence à elle, ni raison plus valable. Et puis, il n'y connaissait pas grand chose, à l'affection, la loyauté, la trahison. Cependant, pour l'avoir vu grandir, l'avoir épaulé depuis le début, l'avoir défendu autant contre sa mère que contre celles comme Euphorie.. Elle n'aurait pas cru qu'il se désintéresserait de la nouvelle. Ce qui ajoutait à sa confusion face à son retour.

Mammifère

L'accueil qu'il reçut de Désastre ne le surprit pas. Il n'avait pas relevé la tête, immobile dans sa posture, sans présenter le moindre signe d'inconfort.
— Et toi pour nous critiquer... répondit Calamité, partageant son calme.
— Ahh, you misunderstand me.
Il releva la tête et redressa son dos.
— Inutile de vous rappeler que vous êtes,
tous les deux,

les seuls descendants vivants de Blade.
Il pencha sa tête sur le côté.
— Après avoir quittés la jungle sans le prévenir, s'entourer de nouveaux héritiers lui est parfaitement admissible.
Il sourcilla, légèrement.
— That said, retenter l'expérience avec la même ne me semble pas logique à moi non plus... Il haussa les épaules.

Mammifère

Dès lors que le violet avait fait son apparition, Astre était devenu une bombe à retardement, ou plutôt une cocotte-minute, la pression augmentant progressivement mais résolument dans son corps. On aurait presque entendu chacun de ses poils, jusqu'à la plus petite pilosité de son museau se dresser les uns après les autres : ping ! ping ! ping !

Il entendait des bruits, des mots, mais son attention était intensément concentrée sur Gunthaer, et lui seul.
Son expression ne changea pas un instant, sinon pour devenir encore plus extrême dans sa grimace agressive, plissant son museau au maximum.
Peu importait que Blade ait intégré cet individu à la Brigade dont faisait également parti Désastre. Peu importait qu'Astre ait toléré de le croiser brièvement (aussi peu que possible) durant les entrevues de leur escadron.
Là. Tout de suite. Avec Calamité à portée du mâle violet auquel le crocodile incombait la raison de la disparition de sa soeur, il ne put faire autrement que d'agir.
Pour protéger sa soeur, et se protéger lui-même d'une nouvelle tourmente si il l'enlevait de nouveau, alors même qu'ils venaient de se réconcilier.
Désastre était bien trop possessif après leur réunion pour laisser Guns simplement rester en la présence de Cal.

Alors, après avoir donné bien assez de signaux pour faire fuir toute une meute, et sans réaction de la part du violacé, les pattes arrières noueuses de Désastre se détendirent dans un effort intense pour propulser les beaucoup plus larges pattes avants vers la menace violette. Le tout accompagné d'un grognement si violent qu'il en méritait presque d'être qualifiée de rugissement.

*So Feminist*

Son expression se détendit à peine aux explications du mâle. Évidemment, qu'elle ne lui en voulait pas (trop) d'avoir cru bon de créer une nouvelle descendance, puisque justement son ancienne était portée disparue. Elle avait beau être bien possessive et naïve, elle n'était plus aussi inconsciente que Gun voulait bien le croire. C'était surtout le point concernant Poison qui lui gelait le cerveau. Elle n'eut toutefois pas la possibilité de lui répondre, quand bien même qu'elle l'aurait voulu, car le niveau de son du grognement de son frère ne fit qu'amplifier. Sans avertissement, enfin, outre son grognement continu depuis l'apparition du violet, Désastre se propulsa vers lui et, avec sa force impressionnante, mis à terre l'autre mâle. Estomaquée par le coup, Calamité ne réagit pas, mais pour peu que Gun lève la patte sur son frère, elle n'hésiterait nullement à lui refaire le portrait.

Mammifère

Le grondement de Désastre s'accentua, lui faisant pivoter les oreilles vers l'avant, se préparant à une attaque. Il pouvait voir chacun de ses follicules se hérisser de colère. Bien qu'il avait l'habitude des mauvaises langue ou d'être fusillé du regard, ressentir autant d'animosité à son égard le refroidit.
— ...
Il ne dressa pas sa queue et ne montra pas les crocs, contrairement au crocodile-loup qui s'arracha du sol dans un puissant bond.
Il avait fermé les paupières, limitant les mouvements inutiles de son corps afin de ne pas céder au cri de son instinct. Il n'était pas un loup, donc rien ne le forçait d'agir comme tel. Au lieu de le laisser le cogner de plein fouet, Gun renvoya son poids dans ses pattes postérieures, se glissant sur le dos afin d'éviter le plus gros de la charge.