Petit détour, ni vu ni connu...

-Pourquoi, y'a pas d'eau là d'où vous v'nez ?
Salama cligna des yeux en les braquant de nouveau sur l'oiseau. L'ironie de cette question l'amusa profondément et elle échappa un sourire sur un court éclat de rire.
Le louvard intervint alors, sermonnant une nouvelle fois sa camarade à plumes :
- Ne sois pas ridicule Kath' , il y'a de l'eau partout voyons !

Son sourire s'élargit et elle plissa les yeux pensivement : les Alterons avaient-ils donc eu trop honte de leur défaite dans le désert pour en parler aux nouveaux nés d'après guerre ?
- Détrompe-toi ! Je viens justement d'un endroit où il n'y a pas d'eau...
Elle s'arrêta en repensant à quelque chose et haussa les épaules pour elle-même.
- 'Fin... En tout cas, il n'y a pas si longtemps, il n'y en avait pas du tout à l'exception d'une seule petite mare, perdue au beau milieu de terres asséchées.
Elle se retourna vers le rapace pour préciser :
- Mais c'est pas pour ça que je suis venue voir cette eau. J'ai entendu des rumeurs... Prononça-t-elle en entretenant le mystère.

Le volatile réagit assez platement à sa réaction, se perdant dans ses pensées, tandis que son compagnon lupin se redressait avec assurance :
- Impossible. Les nuages emmène l'eau partout ! C'est mon père qui me l'a dit. Le jeune leva les yeux au ciel et Salama sourcilla.
Donc, il n'avait pas entendu parler du désert, et donc vraisemblablement pas de la guerre ?
- Et... ton père ne t'a pas expliqué ce qu'était le désert ? Fit-elle en regardant vers le ciel comme étonné.
Si les Alterons avaient trop honte de leur défaite pour en parler à leurs jeunes, elle, en revanche, n'allait pas se gêner pour en donner tous les détails si le louvard se montrait réceptif...

- " ledezer " , jamais attendu parler.
Y a pas qu'a lui qu'on a pas parlé... je sais même pas ce que c'est un désert. Vas-y, explique...siteuplait.
Un instant d'étonnement saisit Salama lorsqu'elle réalisa que le volatile était probablement bien jeune lui aussi. On ne l'aurait pas cru en voyant l'envergure gigantesque du rapace, mais la métisse savait qu'il fallait toujours se méfier des apparences... et pas seulement parce qu'elle était née au pays des mirages.
- Tu préfères les paroles d'une inconnue à celles de ton clan Kath ? Je te croyais plus futée.
Salama pencha la tête sur le côté.
- Dis-moi, petit, tu veux devenir quoi plus tard pour t'amuser à courir comme tu le faisais ici ?
Bah, s'il ne voulait pas la croire, elle allait bien trouver un moyen d'aiguiser sa curiosité suffisamment pour qu'il en fasse la découverte lui-même. Avec un compagnon ailé, ça ne devrait pas prendre trop de temps non plus, et ça lui éviterait des discours descriptifs ennuyants au possible...

- Déjà, tu devrais savoir que j'ai une cervelle de piaf. Et que ça rime rarement avec intelligence ! Ensuite...c'est pas que je crois pas ce qu'on nous a dit... puisqu'on ne nous as rien dit, justement. Vaut mieux des infos douteuses que rien du tout. Soit dit sans offense. Remarqua le volatile face au cynisme de son camarade lupin.
Salaman haussa les épaules.
- Y a pas d'mal. Avant de se retourner vers le louvard : - Dis-moi, petit, tu veux devenir quoi plus tard pour t'amuser à courir comme tu le faisais ici ?
Le jeune fit un pas en arrière, sur la défensive. La blonde pencha la tête, amusée de susciter tant de méfiance. Sa mine se renfrogna un instant, sous son masque, en se demandant si Gunthaer avait tiré un amusement semblable lorsqu'il s'était improvisé son chien de garde lors de l'occupation de l'oasis...
La réponse du petit Alteron la ramena à la situation présente :
- A quoi cela pourrait bien vous servir, bête à cornes ? Vous demandez ça à tous les jeunes que vous rencontrez ?
Elle le toisa sans répliquer pendant quelques instants.
Ils foutaient quoi avec leur mômes à Alteron ? Ils leur lavaient le cerveau ou quoi ?
A bien y réfléchir, cela n'aurait rien eu d'étonnant...
Salama roula des yeux.
- Nan, juste aux gamins qui n'ont l'air de ne croire que ce qu'ils voient ! Trancha-t-elle. Donc si c'est ton cas, tu peux remonter un peu au nord d'ici, derrière les montagnes rocheuses à l'horizon...
Elle jeta un coup d'oeil au rapace avant d'ajouter :
- A vol d'oiseau, doit pas y en avoir pour plus de quelques heures en volant vers le nord-ouest.
Elle s'ébroua puis s'étira nonchalamment, lorgnant vers les deux compères.
- 'fin j'dis ça, j'dis rien. Mais pour devenir éclaireur, messager ou j'sais pas quoi, c'est ptêtre bien de savoir où on met les pattes ! Finit-elle en entreprenant de descendre vers le bassin d'eau thermal.

- Qu'est- ce que vous en savez , vous ?!
Salama se retourna juste pour hausser les épaules avec un petit sourire et répondre :
- J'suis voyageuse.
- Et donc....? Non parce que je suis p'têt pas aussi futée qu'un loup et j'ai un odorat pourri mais votre récit sent pas le fini. Si j'avais voulu des renseignement sur le terrain, j'aurais demandé à J...euh à quelqu'un !
La plumée, en revanche bien plus intéressée par les propos de la louve, eut tôt fait de la rattraper à pied (Salama renifla pour s'empêcher de pouffer face à la grotesque démarche d'un volatile cloué au sol).
- Je vous aurais cru plus bavarde, étrangement.
Déterminée à les rendre assez curieux pour aller voir par eux-mêmes, la métisse se fit volontairement nonchalante et tardive à répondre, leur faisant signe qu'elle écoutait toujours tout en se dirigeant résolument vers l'eau : elle était venue pour ça, oui ou non ?
- Tu dis ça parce qu'elle est blonde ?
Elle lâcha un éclat de rire alors qu'elle se débarrassait de nouveau de son couvre-chef au bord du bassin.
- Théorie intéressante, mais tu risques de bien regretter tes poils noirs si tu t'aventures là d'où je viens... S'amusa-t-elle.

Du tac au tac, le rapace répliqua :
- Pourquoi ? Vous êtes pas gentil avec les noirs ?
Prise par surprise, Salama éclata de rire. Mais une parcelle de son esprit se faisait la réflexion que dans un sens, c'était pas totalement faux depuis l'invasion "des loups noirs"...
- Nope ! Par contre le soleil et la chaleur, eux... Ne sont vraiment pas gentils avec les fourrures noires... Ni les peaux claires, d'ailleurs.
Fei en était un bon exemple, après tout... Valait mieux une fourrure ébène qu'une peau rose dans le désert, d'ailleurs.
- Mais pour en revenir à notre histoire : si je n'en dis pas plus, c'est bien parce que je n'ai pas l'intention de vous mâcher le travail ! ♪ Chantonna-t-elle en reprenant sa marche vers l'eau.

De nouveau, le rapace lui bloqua la route, plus virulent que la première fois même, agitant ses plumes dans tous les sens. Salama leva les yeux en soupirant. Mais en fait, même si elle aurait parié le duo plus enclin à aller voir par eux-mêmes, elle ne pouvait nier le succès de son plan "aiguiser leur curiosité".
- Minute papillon ! T'as commencé tu termines ! ...... S'il te plait !
- Ouais ! Tu as commencé , tu termines !
- Très bien. Vous voulez savoir quoi exactement ? Fit-elle tout en inspectant l'eau d'apparence vaguement laiteuse et d'une couleur inhabituelle. Elle la renifla, fronçant le nez à l'odeur fort de soufre qui s'en échappait. Elle plongea la patte dans le bassin cependant, sachant de source sûre qu'il n'y avait rien de dangereux à moins d'y rester beaucoup trop longtemps.

- Ben.... tout !
Salama leva les yeux au ciel. Classique.
- Enfin tout, ça risque d'être long.... Tout ce qui concerne Alteron et le désert ?
- Hum... Fit-elle, pensive. Elle n'avait pas franchement prévu de devoir leur raconter les... faits de leur meute sur la sienne (enfin son ancienne... An-sienne hahaha *sort*). Mais visiblement elle n'y couperait pas. Au moins, s'ils étaient assez curieux pour la harceler à ce point, ils seraient peut-être assez intrigués et, ou choqués par cette histoire pour poser les bonnes questions une fois chez eux...
Le louvard profita de son inattention pour bondir dans le bassin, l'aspergeant généreusement, mais Salama resta de marbre, levant un simple sourire défiant au plus jeune qui croyait peut-être l'ennuyer ainsi. On apprend pas au vieux singe à faire la grimace !
- L'eau ne va pas te bouffer.
La métisse haussa les épaules avant de rentrer, bien tranquillement, dans l'eau laiteuse, frissonnant tant la sensation de chaleur lui était agréable. Elle rejoignit le jeune Alteron, se positionnant volontairement plus près de lui que la politesse ne l'aurait exigé.
- Biiien. Je vais vous raconter une histoire, les enfants ! Informa-t-elle, prenant une voix niaise alors qu'elle amenait une patte au-dessus du crâne du louvard pour le tapoter.
- La meute qui vit dans le désert n'y a pas toujours vécu...
Et la narratrice étant fort paresseuse et ayant très beaucoup la flemme de tout narrer, elle vous laisse le soin de considérer que Salama a expliqué toute l'histoire de l'Exil des Blackbloods, en mentionnant bien entendu Rapier. Et elle vient de s'arrêter pour les laisser digérer ce brin d'Histoire avant d'attaquer le coeur du problème.

Lorsqu'elle eut terminé, elle jeta un coup d'oeil intéressé à l'oiseau, retenant un sourire moqueur en témoignant du regard vide associé à la position étonnante de sa tête.
La réaction du louvard, en revanche, fut bien moins amusante... Il la fixait avec des yeux écarquillés et furibonds.
- Tu mens... Il se redressa brusquement, l'aspergeant d'eau, alors qu'il lui bondissait dessus, crocs en avant. Une douleur aigüe lui transperça le poignet là où le gamin planta ses crocs.
- TU MENS...!
Par pure réflexe, Salama agita la patte qu'il avait agrippée, après avoir lâché un piaillement aigu de protestation.
En désespoir de cause et ne voulant pas non plus rentrer dans ce jeu de violence, elle baissa brusquement la tête, cognant son front contre celui du plus jeune pour lui faire lâcher prise.
Elle s'offrit ainsi le luxe d'une belle bosse plus tard, mais au moins, sa patte était de nouveau libre. Douloureuse mais libre.
Profitant de sa nouvelle liberté, elle bondit hors de l'eau, s'ébrouant rapidement.
- Et ce n'était encore que le début, mais je pense que maintenant vous savez pourquoi je préférais vous laisser l'opportunité de le découvrir par vous-même.
Elle se faufila jusqu'à son crâne qui traînait par terre.
- Ce que vous allez devoir faire pour connaître la suite de l'histoire, 'cause I'm outta here, now !
Elle saisit son casque par une corne et s'empressa de filer, les laissant seuls face à leur découverte.



[PITIÉ Moon, essaie pas de la rattraper, sinon on n'en sortira jamais ! xD]