Les chemins se développent

*Much Concern*

Prio' Elsa
[ Milieu de l'automne, An 6 ]

Ses pattes foulaient l'herbe jaunâtre, autant craquelée que l'était les plantes et arbres qu'il avait croisé. L'extérieur du Désert semblait se mourir peu à peu, mais en même temps, la nature n'était pas agonisante : partout, c'était des explosions de couleurs vives. Au court de son périple, il avait était passé au sein de boisés flamboyants, qui lui rappelait les arbres rouges de l'Oasis, même si la flore ici était forcément différente de sa terre natale. Il n'avait jamais cru partir du Désert, enfin, pas tout de suite, pas après le départ de ses compatriotes. Pourtant, il l'avait fait, sans trop avoir le choix : s'il restait, sa maladie dégénérerait. Elle lui avait déjà coûté temporairement la vue, et il s'en était rattrapé de justesse. Les journées passées dans la noirceur le faisait encore frissonner. Chrysanthos avait dû faire attention à son alimentation et avait dû reprendre les exercices qu'il avait délaissé depuis la mort de son père. Et comme il ne pouvait se résoudre à ce mode de vie dans le désert, il était parti de chez lui, comme chaque membre de sa famille avant lui. Cela faisait à présent environ deux semaines qu'il avait débuté sa vie en solitaire et il arrivait enfin à la destination qu'il s'était fixé : le camp des hommes. Le voyage lui avait pris plus de temps que prévu, à la fois parce qu'il marchait à son (lent) rythme et parce qu'il s'était un peu perdu, sans adulte pour le guider. Il s'arrêta lorsqu'il pu distinguer les tipis au loin, leurs feux lui apparaissant dans le crépuscule. Sachant qu'il ne devait pas s'approcher des bipèdes, mais ne sachant pas jusqu'à quelle mesure il devait être prudent, Chrys bascula sa tête vers l'arrière et lança un hurlement. Le camp l'entendrait, sans nul doute, de même que les Blackbloods en son sein ; peut-être l'un d'entre eux reconnaîtrait son timbre de voix, mais il en doutait. Au mieux, un loup serait peut-être intrigué et viendrait voir.

Oiseau

Elsa

❝ Automne de l'An 6, au terrain de dressage du Clan du Loup...❞

Si l'entraînement aurait pu lui plaire en temps normal, Elsa n'était pas pourtant assidue dans son travail. Elle ne cessait de penser à l'Oasis et n'arrivait pas à se défaire de l'idée qu'un nouvel assaut avait peut-être lieu en son absence. Elle essayait de se consoler en se disant qu'en cas d'assaut, être ici ou là-bas, le résultat serait le même : elle ne serait pas d'une grande aide en cas de bataille et serait même sûrement un fardeau. Pourtant, son esprit ne semblait pas s'apaiser. Ses nuits étaient fréquemment troublées par des cauchemars plus ou moins violent sur l'attaque Alteron bien que cette dernière date de plusieurs lunes déjà...
La Blackblood faisait donc le minimum pour écouter son entraîneur, exécuter ses ordres, mais cela s'arrêtait là. Elle n'était plus motivée pour rapporter fièrement ses trois tatouages à l'Oasis. Qu'importait le nombre de parures ? Ce n'était pas de vulgaires décorations qui détermineraient sa capacité à protéger sa meute, sa famille. Ce qui l'intéressait, c'était d'apprendre à se battre, afin de faire tâter de ses crocs aux prochains intrus qui viendraient s'en prendre aux êtres chers à ses yeux. Mais surtout pour montrer à ses chiens d'Alteron ce qu'était un massacre, du sang coulé. D'ailleurs, depuis son départ du désert, sa musculature c'était bien développée, la rendant plus impressionnante que lorsqu'elle était plus jeune.
Elsa secoua la tête pour chasser ces mauvaises pensées avant de se relever pour s'ébrouer. Elle soupira, regarda le ciel, un soupçon de mélancolie dans les yeux en repensant à son chez-soi.
Mais ce fut un hurlement qui la tira de ses rêveries. Ses oreilles se dressèrent et elle tourna les talons, fonçant tel un canon vers son terrain d'entraînement. Ses pattes se soulevaient toutes seules et son cœur battait la chamade. Ce hurlement, cet appel, elle aurait pu le reconnaître entre mille.
La louvarde aperçu enfin une silhouette crème. La silhouette qu'elle s'attendait à voir. Elle s'arrêta à une certaine distance.

«Chry-Chrys...?» Murmura-t-elle, ne semblant pas y croire.

Elle cligna des yeux, la gueule entrouverte. Elle se demanda même si elle ne rêvait pas, mais ses babines s’étirèrent vite en un large sourire et, parcourant la distance qui les séparait à vitesse grand V, elle se jeta contre lui en s'écriant une nouvelle fois :

«Chryyyys ! ♡»

*Much Concern*

Son hurlement terminé, Chrysanthos abaissa lentement sa tête. Soudainement, les doutes lui vinrent : et si personne ne répondait à son appel ? Et si c'était des chiens agressifs qui le faisaient ? Ou des hommes ? Il n'était plus très sûr, mais il doutait que ces étranges créatures peuplant le camp apprécie de voir un loup roder autour du camp. Selon les histoires rapportées, ils étaient plutôt de types conservateurs.. Il s'agita donc sur place, ses oreilles tiquant alors que sa queue ondulait entre ses cuisses. Puis, son regard fut attiré vers un point qui s'était mis en mouvement sur les plaines. Son museau fouilla l'air et malgré les odeurs étranges dont il était assaillit, il parvint à identifier avec précision cette odeur. La silhouette grandissante lui donna bientôt raison : ce pelage rougeâtre ne pouvait appartenir qu'à une seule louve. Chrysanthos se redressa, mais voyant sa grande amie courir à pleine vitesse vers lui, il garda sa position. Mais une nouvelle énergie était apparut en lui, une énergie qu'il ne croyait plus posséder. Il souleva sa queue filamenteuse dans les airs, un sourire lui étirant les traits. Puis, Elsa arriva sur lui et l'entoura de ses grosses pattes, s'exclamant :
- Chryyyys ! ♡
Tout aussi émerveillé qu'elle de leur retrouvaille, Chrysanthos ne comprit pas trop ce qui se produisait. Il était là, au camp des hommes, avec Elsa, avec Elsa qui lui sautait dans les pattes ? Il n'y croyait pas, et de ce fait, son humeur s'allégea. Tançant sous le poids de son amie, il s'esclaffa de bon coeur :
- Woaaah doucement madame Blackblood ! J'ai p'têtre grossi, mais tu m'dépasse encore en force !
L'enthousiasme lui était peu commun, c'était un rôle emprunté à un autre, mais il en était réellement heureux.

Oiseau

Elsa

L'enlaçant de ses pattes musclées, la Blackblood ferma les yeux et respira son effluve qui lui avait tant manqué.

«Woaaah doucement madame Blackblood ! J'ai p'têtre grossi, mais tu m'dépasse encore en force !» S’esclaffa le mâle, chancelant sous le poids de son amie.

Elsa se mit à rire aux éclats, se décollant de lui pour le laisser un peu respirer mais gardant tout de même ses pattes posées sur ses épaules. C'est le sourire aux babines qu'elle lui répondit d'un ton malicieux :

«Travailles tes appuis pour la prochaine fois !»

A ce moment là, rien n'aurait pu briser sa bonne humeur. Son sourire était revenu et ne semblait pas prêt de s'effacer. Chrysanthos lui avait affreusement manqué, elle le remarquait surtout maintenant, depuis qu'il se tenait devant elle, devant ses yeux. Le voir lui semblait presque irréel.

«Tu m'as tellement manqué !» S'exclama-t-elle avant d'adopter un ton plus humoristique, les sourcils froncés. «C'est bien vrai tout ça ? J'suis quand même pas en train de rêver de toi, hein ?»

*Much Concern*

Leur étreinte dura un bon moment, et même s'il devait tituber sur place pour garder son équilibre, Chrysanthos était franchement heureux de ce contact. Sa compagne se décolla par la suite,, mais garda ses pattes appuyées sur ses épaules. Son poids l'écrasait encore un peu, mais Chrys parvint à se redresser tant bien que mal, tout sourire.
- Travailles tes appuis pour la prochaine fois ! Lui lança-t-elle.
Il se contenta de lui jeter un sourire, avec un regard perdu; contrairement à Elsa, il n'avait suivit aucune formation guerrière et n'avait aucune conscience de son corps, enfin, niveau combat et équilibre. Son regard glissa brièvement sur elle : en effet, elle n'avait pas chômé, durant ces saisons écoulées ! Elle qui avait toujours été bien grande avait encore plus poussée, et il pouvait percevoir toute sa musculature.
- Tu m'as tellement manqué ! S'eclama Elsa. C'est bien vrai tout ça ? J'suis quand même pas en train de rêver de toi, hein ?
Un fin sourire étira ses babines et il plissa ses yeux, pareillement malicieux.
- Quoi, ce serait ton genre de rêver à moi ?
Il la titilla, la moquerie dans sa voix. Puis, il lui donna un coup affectueux de museau, voulant rattraper sa bêtise.
- Moi aussi j'suis content de te voir.

Oiseau

Elsa

«Quoi, ce serait ton genre de rêver à moi ?» Répliqua-t-il du tac au tac.

«Bah non, c'est bien ça qui m'étonnes !» Lâcha à son tour la Blackblood, avant de lui tirer malicieusement la langue.

Elle le fixa, l'oeil pétillant, semblant avoir retrouvé sa gaieté d'antan. Puis Chrys vint la pousser gentiment du bout du museau. Plus sérieux cette fois, il lui admit :

«Moi aussi j'suis content de te voir.»

La phrase fit s'envoler une nuée de papillons dans le ventre de la Blackblood. Ce sentiment, qu'elle n'éprouvait que pour Chrysanthos, ne lui était pas désagréable, au contraire. Si le rouge lui était sûrement monté aux joues, elle réussit à lui sourire posément, ne se laissant pas submerger par le plaisir qui la rendrait béate.
Elle le fixa ainsi un petit instant, savourant la douceur des ces retrouvailles, mais jugea bientôt qu'un loup n'était pas toujours le bienvenu sur les terres des Hommes et qu'ils seraient peut-être plus tranquilles ailleurs.
Du bout du museau, elle désigna les buissons, situés à la bordure du terrain d'entraînement.

«Avec l'entraînement, l'endroit est pas mal peuplé. Viens par là, on sera plus tranquilles.» L'informa-t-elle en se déplaçant vers le bosquet.

*Much Concern*

- Bah non, c'est bien ça qui m'étonnes ! Répliqua la rouge du tac au tac.
Plissant ses yeux, cette fois par fausse bouderie, Chrys lui tira la langue. Puis, retrouvant son sérieux, il lui avait dit avec sincérité s'être ennuyée d'elle. Il sentit la chaleur monter en Elsa, malgré son sourire posé. Et puis, la façon dont elle le regardait, en silence, mais en le détaillant profondément, en disait long sur sa joie réelle. Il échappa un sourire malaisé, quelques picotements lui engourdissant les sens à être la cible de son attention. La femelle détourna ensuite le museau, pointant la végétation qui s'épaississait plus loin.
- Avec l'entraînement, l'endroit est pas mal peuplé. Viens par là, on sera plus tranquilles, dit-elle en l'amenant vers là.
Sans émettre de protestation, Chrysanthos la suivit. Voulait-elle l'éloigner du camp, au cas où ils se feraient attrapés par des chiens ? Était-ce si pire que cela ? Était-ce si stricte qu'Elsa ne pouvait l'amener "chez elle" ? Le louvard crème se retint de poser ses questions, de gâcher le moment. Il dit plutôt, d'un air complètement niais :
- J'ai déjà droit à un rendez-vous dans les buissons ? ~ ♥

Oiseau

Elsa

«J'ai déjà droit à un rendez-vous dans les buissons ? ~ ♥ » Lança Chrysanthos, la suivant derrière le bosquet.

Elsa se mit à rire. Elle se coucha, se mettant à l'aise dans leur cachette de fortune avant de lui répondre, une lueur amusée dans les yeux :

«Eh, on se clame Don Juan, où je t'envoies danser avec les chiens ♥»

Elle lui fit un clin d'oeil, l'invitant à s'installer près d'elle, comptant bien profiter de se moment un maximum.

HRP:

*Much Concern*

[Mais c'est okay <3 ]

Alors qu'il lançait sa plaisanteries, ils atteignirent la végétation. Prenant son temps avant de lui répondre, Elsa se coucha tranquillement, puis le contra :
- Eh, on se clame Don Juan, où je t'envoies danser avec les chiens ♥
- Ohhhh, souffla-t-il, comme éberlué.
D'un mouvement de museau, Elsa lui désignait le sol à ses côtés, l'invitant à se coucher pareillement. Mais ne désirant pas faire de même, Chrysanthos se contenta de s'asseoir sur le sol - de toute façon, avec sa grandeur, la différence n'était pas bien grande ! Depuis les paroles de la rouge, il avait gardé un air pensif, comme en grande réflexion. Puis il demanda, légitimement intrigué :
- Tu penses que les chiens dansent bien ?

Oiseau

Elsa

Le regard dans le vague, Chrysanthos sembla réfléchir un moment. Après avoir lâché un «Ohhhh» abasourdit, il posa ses fesses sur le sol et tarda un peu avant de demander :

«Tu penses que les chiens dansent bien ? »

Elsa haussa un sourcil, se retenant de pouffer à la vision de Cyrus qui dansait dans son esprit.

«Disons que je leur ait pas vraiment demandé !» S'exclaffa-t-elle avant de reprendre, plus sérieuse. «Ils sont pas vraiment différents de certains d'entre nous, tu sais.»

La Blackblood regarda le vide, rassemblant les images des chiens qu'elle avait mémorisé dans son esprit. Ils vivaient le plus souvent dans un espace clôt, chose qu'elle ne pourrait supporter. Vivre toute sa vie en captivité, à traîner les hommes partout ? Ça jamais !

«Si ce n'est que je ne comprends pas leur désir de rester en captivité... Je ne pourrais tout simplement jamais vivre comme eux, c'est quelque chose qui m'est incompréhensible. C'est possible de vivre sans liberté ?»

Pure question rhétorique de sa part. Elle avait déjà sa propre idée sur la réponse.

*Much Concern*

- Disons que je leur ait pas vraiment demandé !
- Dommage, j'aurais bien voulu savoir, murmura le mâle, gardant son semblant de sérieux.
Puis, Elsa adopta réellement une expression plus sobre, obligeant Chrysanthos à faire de même ; après tout, il ne voulait pas perdre la femelle en disant une montagne de conneries.
- Ils sont pas vraiment différents de certains d'entre nous, tu sais.
- Mhh-mhh, commenta-t-il, fort sceptique.
Enfin, il ne les avait jamais rencontré, mais on les lui avait décrit comme des nains ayant oublié leurs racines sauvages, désormais obnubilés par la pureté de leur "race" et fort raciste à ce sujet. Sûr, ils restaient des canins, mais Chrys doutait que les ressemblances se poussent au-delà.
- Si ce n'est que je ne comprends pas leur désir de rester en captivité... Rajouta toutefois la rouge. Je ne pourrais tout simplement jamais vivre comme eux, c'est quelque chose qui m'est incompréhensible. C'est possible de vivre sans liberté ?
- Et qu'est-ce qui te dis que t'es libre ? Relança Chrys, toujours un peu niais, même s'il reprit de son sérieux : La liberté, c'est relatif. Moi, je suis prisonnier de ma maladie, tu vois ! Prisonnier aussi des terres où je peux pas aller, des proies que je peux pas manger, et des heures que je dois passer à survivre, énuméra-t-il. Eux, ils n'ont pas ces problèmes là, ils ont du confort. Nous, on se soumet à notre Cap'taine ; eux, à leur Village. La liberté, c'est aussi de choisir sa vie.
Le jeune mâle lécha son museau, puis accepta de se coucher sur le sol ; mais il s'y laissa tomber sans douceur, roulant sur le dos.
- Pourquoi la vie que tu choisis est plus libre que la leur ? Au fond, c'est juste les valeurs qui t'ont élevée qui sont différentes.

» A la croisée des chemins || Toshiro