Wind

(Printemps, An 6)

Le vent avait ses bons côtés. Avec sa grande puissance, il pouvait se permettre de balayer les moindres pistes, les moindres preuves, les moindres indices et ainsi effacer la trace d’un individu à tout jamais. Cela faisait quelques saisons déjà que Julius avait péri sous les yeux de Thunderhead. Le nouveau Tyran n’avait pas tourné autour du pot quant à la façon dont le César était mort. Néanmoins, les rumeurs ne cessaient de fuser puisque ce n’était nécessairement tout le monde qui appréciait le seul et unique Héritier de la meute. Ils n’auront d’autre choix que de s’y faire cependant. La dictature de Thunder’ avait rapidement fait sa place. Il était moins agressif, glaciale et violent que Julius en apparence, mais il restait un loup des plus imprévisibles et brutal. Les manières de Thunder’ étaient différentes de son paternel, mais elles y ressemblaient à la fois. Ceux qui avaient été victime de ses menaces, puis des exécutions pouvant bien en témoigner. Toutefois, personne ne pouvait véritablement nier que la meute possédait maintenant un climat différent. Le nouveau Tyran faisait des pieds et des mains pour tenter d’instaurer ses idéaux dans le Grand Nord, mais il restait encore bien des choses à améliorer à son goût.

Debout devant le vent, déjà moins violent qu’en hiver, qui balayait la surface gelée, Thunderhead examina les alentours à la recherche peut-être d’une idée, d’une solution. Il était plutôt rare de le voir quitter le confort de la Caverne de Glace pour s’aventurer plus loin, seul. Avec son jeune âge, il restait un Tyran des plus immatures qui appréciaient la compagnie des dames en plus d’être extrêmement envieux et tortionnaire, mais dans un côté de son esprit, il ne souhaitait pas reproduire les mêmes erreurs que Julius et donc se rapprocher d’un certain confort pour lui puis pour sa meute. L’idée d’explorer un nouveau recoin du territoire afin de dénicher un meilleur abri pour l’automne et l’hiver lui traversait l’esprit quand il entendit une série de petits pas dans sa direction. Thunder’ ne bougea que légèrement la tête pour regarder par-dessus son épaule de son œil violet. L’invité ne se voulait pas discret et l’odeur du Grand Nord parvint facilement à la truffe du Tyran qui ne fit que se relever pour l’accueillir.

Les hauts plateaux n'étaient pas l'endroit le plus favorable pour penser, et il le savait bien. Pourtant, quelque chose le poussait à toujours à venir ici et à s'affairer le temps de quelques heures. Comme d'habitude, ses pattes lui faisait mal. Il se sentait ankylosé. Il se sentait nauséeux. Heureusement pour lui, ce genre de malaise ne durait jamais longtemps, et il n'avait jamais eu besoin de consulter un apothicaire afin de soustraire ce mal avec quelques plantes magiques, dont il doutait de leur efficacité de toute manière.

Comme personne ou presque n'aimait passer par ici - la plupart des citoyens s'arrêtaient près de la grotte de glace pour son confort habituel - il ne s'était jamais attendu de croiser quelqu'un pendant sa promenade habituelle. Ainsi, lorsque ses yeux lui avisèrent la silhouette d'un autre loup, au loin, il crut à un mirage. Peut-être la douleur lui était monté à la tête et qu'il s'était mis à halluciner des formes, qui sait. Il abaissa ses oreilles, comme s'il s'était préparé à cette éventualité. Comme s'il ne s'agissait pas de la première fois.

Le vent criait et sifflait, balayant la neige poudreuse comme de la poussière opaque, tourbillonnant autour de ce qui lui semblait être son mirage. Darjeeling se raidit en constatant que son odeur aurait pu alerter ce-dernier. lorsque le vent lui apporta à son tour une autre odeur, il se détendit d'un seul coup, se moquant de sa propre stupidité: pourquoi s'était-il imaginé qu'un mirage aurait pu capter son odeur ? Ça n'avait aucun sens. Ainsi, il s'avança de meilleur mine vers cet autre loup, qui, comme s'il anticipait sa rencontre, s'était levé et le regardait désormais par-dessus son épaule, d'un oeil pétillant.

Une telle force de caractère ne brillait pas dans les yeux de tous. Darjeeling reconnut le jeune César Thunderhead. Darjeeling le salua d'un sourire franc, cherchant à maintenir sa queue basse.
- Avé, César !
Puis, il fit mine de regarder autour, avant de lever sa tête d'un seul coup.
- Oh— vous êtes seul. Il jeta un regard à gauche, et à droite, avant de se recentrer sur son supérieur. Je ne comprends pas, où est votre garde ?

Hésitant, peut-être un peu méfiant d’abord, le nouveau venu avait pris de son temps avant de revenir le rejoindre. Le vent siffla et claque contre la pelisse de Thunder’ qui dut rabattra son visage vers son flanc pour se dégager de la gifle que lui réservait ce territoire désertique. Néanmoins, il garda toujours son œil violet brillant, pétillant, rivé sur Dart qui s’avança cette fois avec un sourire, conservant sa queue plus bas que possible.  

- Avé, César !

Thunderhead hocha vaguement la tête avant qu'un léger sourire ne se dessine aux coins de ses lèvres.

- Citoyen Darjeeling. fit-il simplement en dévisageant de haut en bas le loup beige.

Le nouveau venu sembla regarder un instant tout autour de lui, mais le César n’en fit pas de cas et tourna le dos à Dart pour retourner à sa position plus confortable, dans un espace que le vent semblait évité et ainsi replonger dans ses songes.

- Oh— vous êtes seul.

Le nouveau Tyran pointa les oreilles avant de retourner sa tête dans la direction de Darjeeling.

- Je ne comprends pas, où est votre garde ?

Thunder’ haussa un sourcil avant qu’il eut un rictus, fermant les paupières.

- Des Gardes ? Je n’ai pas besoin de Gardes qui suivent et marchent dans le moindre de mes pas. fit-il en dardant ses prunelles vairons sur le Citoyen. Mais si cela t’inquiète, sache qu’ils ne sont néanmoins jamais bien loin. rajouta-t-il en levant la truffe et rouvrant les yeux. Dit moi plutôt que ce qui t’amène Dart sur cette partie du territoire… Surtout que tu y viens seul, pour ta part. conclut-il en regardant à son tour derrière Darjeeling pour déceler une autre présence.

- Des Gardes ? Je n’ai pas besoin de Gardes qui suivent et marchent dans le moindre de mes pas. Ce n'était pas ce que Darjeeling pensait: Julius avait chu et son corps n'avait pas été retrouvé, ce qui rendait Thunderhead vulnérable à une attaque. Après tout, si Julius avait été victime d'assassinat, son fils héritier ne tarderait pas à le suivre, d'où la nécessité de s'entourer de gardes.

D'un autre côté rien ne pouvait réellement prouver l'innocence ou la loyauté chez un individu: un garde toujours placé à ses côtés pourrait s'agir d'une grande imprudence, surtout si ce-dernier complotait de le tuer.
- Mais si cela t’inquiète, sache qu’ils ne sont néanmoins jamais bien loin, lui assura le César, comme s'il devinait ses réflexions. Darjeeling hocha la tête, tenant là son explication. Après mûre réflexion, il approuvait: c'était en fait un plan stratégique. De plus, César Thunderhead n'avait pas la carrure d'un faible et semblait plus que capable de se débrouiller par lui-même. C'est pourquoi il préféra se pencher sur le situation de son subalterne:
- Dit moi plutôt que ce qui t’amène Dart sur cette partie du territoire… Son timbre parut s'affermir: Surtout que tu y viens seul, pour ta part.
Darjeeling poussa un soupir avant de détourner les yeux, la bonne humeur dans son regard semblant se ternir de mélancolie.
- J'aime cet endroit. lui répondit-il alors en toute franchise, laissant ses yeux se glisser sur le plateau et ses hauts monts. Il se retourna vers son supérieur. C'est ici que j'ai rencontré le Magistrat Engela avant de faire partie de la meute, alors j'y viens souvent pour m'y recueillir. Ses yeux s'arrêtèrent sur un mont en particulier, avant qu'il ne lève un sourire sincère. La douleur et les ecchymoses dans ses pattes lui rendait difficile la tâche de se tenir debout. Le vent sur les plateaux n'aidait pas, fouettant sa fourrure et ses blessures sans ménagement. Suffisamment nourri, toutefois, il avait l'énergie nécessaire pour endurer le supplice. En se rappelant d'Engie et de sa douleur, il enchaîna:
- Vous vous remettez de vos blessures, César Thunderhead?

Le soupir du Citoyen lui fit frémir les oreilles. Thunderhead coula par ailleurs ses prunelles vairons, les paupières mi-close, vers Dart afin de contester de lui-même que l’éclat dans ses yeux n’était plus le même. Le Tyran pianota légèrement le sol pour refaire circuler le sang dans ses coussinets et ses doigts avant de redresser légèrement son poitrail.

- J'aime cet endroit. C'est ici que j'ai rencontré le Magistrat Engela avant de faire partie de la meute, alors j'y viens souvent pour m'y recueillir.

Le regard de Thunder’ suivit un moment celui de Darjeeling, se contorsionnant légèrement le cou. Il observa le paysage avant de regarder de nouveau le loup polaire, dont le visage se couronnait d’un sourire, de biais un brin ennuyé. Thunderhead n’avait rien de précieux. Pas de précieux souvenir qui avait de quoi le faire sourire. Il ne connaissait pas la nostalgie. Il savourait simplement le moment présent, profitait de sa condition actuelle, le reste lui importait. Les souvenirs n’étaient que pour lui le moyen de se glisser dans une illusion confortable ou alors pour se remémorer des erreurs.

- Palpitant. fit-il plus fatigué qu’ironique.

- Vous vous remettez de vos blessures, César Thunderhead?

Thunder’ eut un rictus, penchant légèrement sa tête et ses épaules vers l’avant. Il clôt les yeux.

- C’est touchant de voir que tu te soucis de ma santé, Dart ~ fit-il avant d’ébrouer sa tête, replaçant des mèches de poils qui furent chassé par le vent de nouveau. Je n’ai jamais été en meilleur forme, mais… (Il regarda du coin de l’œil Dart) Je le serais davantage si tous était au travail. Rassure-moi… la chasse est toujours aussi bonne. conclut-il en baissant le museau, haussant les sourcils.

- C’est touchant de voir que tu te soucis de ma santé, Dart ~
- Mm. C'est la moindre des choses.
de répondre Darjeeling, laconique.
- Je n’ai jamais été en meilleure forme, mais… Je le serais davantage si tous étaient au travail.
Le loup auburn acquiesça d'un bref signe de tête. Il était vrai que la plupart des membres étaient bouleversés: certains refusaient le changement en se languissant de l'ancienne tyrannie de Julius, alors que d'autres s'étaient tus mais refusaient de collaborer au sein de la meute encore gouvernée par la chaos. Certes Thunderhead était à sa tête, il n'y était pas encore tout à fait encré pour pouvoir diriger les troupes comme il se devait. Et cela constituait un problème, aux yeux de Darjeeling. Sans cohésion, les escouades finiraient par s'autodétruire. Il fallait de l'ordre: il avait mis toute sa confiance en Engela pour leur assurer qu'il se maintienne. Évidemment, outre les problèmes politiques, il fallait encore survivre: la rigueur du terrain ne leur permettait aucun faux-pas.
- Rassure-moi… la chasse est toujours aussi bonne ? Darjeeling secoua la tête d'un bref mouvement, sans baisser les yeux.
- Le début de l'été va annoncer le départ des caribous et des bœufs musqués vers le sud. Les bœufs ne s'éloignent jamais de la Toundra, mais les caribous peuvent s'agglutiner jusqu'aux terres d'Inaria.
Il hocha succinctement la tête.
- En revanche, les lièvres, les lemmings, les hermines et les visons vont connaître une croissance démographique importante. Il soupira, levant un demi-sourire, l'air un peu résigné. Malheureusement, mes pairs sous-estiment encore l'importance de ces "petites proies".
Il sembla reprendre des couleurs, laissant couler.
- C'est compréhensible. La plupart sont encore encrés dans l'ancien régime, après tout.

Le léger mouvement de tête de Dart laissa le doute planer dans l’esprit de Thunderhead qui s’était presque redressé sur la pointe de ses griffes. Pour le Tyran, c’était le signe, d’une négation. Il pointa ses oreilles vers le haut et plissant les yeux ainsi que le museau tout en dardant ses prunelles enflammées sur Darjeeling.

- Le début de l'été va annoncer le départ des caribous et des bœufs musqués vers le sud. Les bœufs ne s'éloignent jamais de la Toundra, mais les caribous peuvent s'agglutiner jusqu'aux terres d'Inaria.

À ce sujet, il ne pouvait rien contrôler et il ne comptait pas non plus lancer des Citoyens à la suite des troupeaux comme le faisait l’ancien César. C’était une perte d’énergie et de temps pour un rendement médiocre. Thunder’ renâcla fortement, abaissant sa tête et la détournant sur le côté.

- Ce n’est pas réellement le bon moment pour me faire remarque… gronda Thunderhead en rivant son œil violet sur Dart en tournant légèrement et tout doucement sa tête.

Un nouveau hochement de tête. Le visage du loup caramel se détendit quelque peu. Il continua cependant de faire de l’évitement, se contentant d’observer Dart d’un œil.

- En revanche, les lièvres, les lemmings, les hermines et les visons vont connaître une croissance démographique importante. Malheureusement, mes pairs sous-estiment encore l'importance de ces "petites proies".

L’attitude du Citoyen avait de calmer le brasier du Tyran. Pour une fois, il en voyait tout aussi préoccupé que lui à ce sujet. Thunder’ esquissa un sourire en coin en relevant d’un trait sa tête, ses oreilles s’en trouvant agitées dans le mouvement.

- C'est compréhensible. La plupart sont encore encrés dans l'ancien régime, après tout.

- À mon avis… (Il leva une patte, détailla ses griffes, ses coussinets) Ils ont bientôt intérêt à changer de camp. fit-il en ne levant que ses yeux vers Dart, puis, il redéposa sa patte au sol, un sourire mesquin aux lèvres. Tu es plutôt… (Il dévisagea Darjeeling de haut en bas, puis le pointa au niveau du poitrail) Citoyen modèle. J’en aurais besoin davantage. conclut-il en expirant fortement.

- À mon avis… Thunderhead lorgna d'un oeil désabusé ses griffes. Ils ont bientôt intérêt à changer de camp, il répondit. Darjeeling comprenait que ce genre de sous entendu pouvait s'agir d'une menace, mais l'essentiel était qu'ils n'auraient pas le choix de s'adapter sous peine de s'épuiser inutilement. Lorsque Thunderhead déposa sa patte sur le sol, Darjeeling sembla crisper ses crocs, comme s'il se rappelait que la douleur qu'il endurait venait de l'électrocuter de nouveau. Il avait eu le temps de nettoyer la boue sur ses avant-mains, mais leur fourrure était encore rêche, due à l'intense effort qu'elles devaient fournir constamment.
- Tu es plutôt… Citoyen modèle. J’en aurais besoin davantage.
Darjeeling secoua la tête.
- Je ne suis pas un modèle, je suis logique: la meute est un mur nécessitant tout le monde.
Il dressa la tête.
- La cohésion assure notre survie. Si je veux travailler pour ce mur commun, la moindre des choses serait de faire confiance à ceux qui dirigent. un petit sourire leva discrètement ses babines, comme s'il achevait sa pensée intérieurement. On aurait dit que ses yeux marron, bien que ternes, venaient de pétiller, très brièvement, d'un éclat de dévotion.

Les menaces avaient toujours fait partie de son quotidien. C’est ainsi qu’il avait su grimper et s’attirer un tant soit peu de confort. Néanmoins, bien qu’il aime ce genre de méthode, il n’avait, d’un autre côté, pas d’autres choix que de l’appliquer. Des changements s’effectuaient tout doucement, mais il en venait à leur survie à tous de suivre leur nouveau régime. Cela n’indiquait pas d’ailleurs nécessairement que certains périraient sous les crocs de Thunder’, mais sous la faim et la fatigue. Être rejeté par la meute du Grand Nord pouvait s’avérer fatal.

Thunderhead releva ses prunelles vairons en sortant de ses pensées. Il vit un nouveau hochement de tête de la part du Citoyen.

- Je ne suis pas un modèle, je suis logique: la meute est un mur nécessitant tout le monde.

Le loup caramel plissa à demi les paupières, dévisageant Dart.

- La cohésion assure notre survie. Si je veux travailler pour ce mur commun, la moindre des choses serait de faire confiance à ceux qui dirigent.

Le Tyran eut un rictus, amusé par les paroles de Darjeeling.

- C’est une bien belle théorie. fit-il en fermant les yeux. Et c’est plutôt agréable de savoir que quelqu’un d’autre semble la partager et la comprendre. (Il rouvrit les yeux, regardant Dart d’un œil brillant) Permet moi donc de reformuler ma dernière phrase… (Il se racla la gorge, étirant son cou et sa tête) Il me faudrait plus de Citoyens Logiques dans cette meute. Sa éviterait… Bien des problèmes, pour certains. rajouta-il en détournant le regard tout en se relevant sur ses pattes. Je serais bien tout ouïe à entendre la suite… (Il avait tourné les talons, regardant Dart par delà son épaule) Une petite marche ? conclut-il en fixant le loup marron de son œil violet.

— C’est une bien belle théorie, répondit le César en levant un rictus, fermant ses yeux. Et c’est plutôt agréable de savoir que quelqu’un d’autre semble la partager et la comprendre. D'abord, il ne s'agissait pas d'une théorie, mais d'un point de vue. Puis, le fait que le césar partageait son point de vue sembla susciter une réaction quoique ténue chez le loup auburn. On aurait dit qu'il venait de sourciller. La réaction fut si brève, si petite, que seul son muscle sourcilier sembla frétiller. Thunderhead, de son côté, avait fermé ses yeux: c'était un signe qu'il considérait les mots qu'il entendait. Le signe qu'il y portait un intérêt. Il rouvrit ses yeux brillant d'ambition, les posant sur Darjeeling, qui avait réussi à garder sa contenance.
— Permet moi donc de reformuler ma dernière phrase… Il me faudrait plus de Citoyens Logiques dans cette meute. pour peu, Darjeeling pouffa, constatant qu'il s'était contenté de réutiliser ses mots. Le César poursuivait: Ça éviterait… Bien des problèmes, pour certains. Puis, en se relevant sur ses pattes solides, il se mit au pas.
— Je serais bien tout ouïe à entendre la suite, une petite marche ?
— Je ne vois pas ce qui pourrait être ajouté... Ce qui nous reste à faire, c'est agir. Darjeeling lui emboîta pourtant le pas.
— Je vous suivrais volontiers, si ce n'était pas de la raideur de mes pattes... Je ne voudrais pas vous ralentir.

Légèrement décalé de côté, le Tyran garda son œil violet rivé sur Dart jusqu’à ce que celui daigne lui réponde. Puis, d’un geste las, il s’était remis sur ses pattes, sur sa ligne de départ. Sa queue se dressa au-dessus de sa croupe et ses oreilles bien droites, pivotèrent vers l’avant signe d’assurance.

— Je ne vois pas ce qui pourrait être ajouté... Ce qui nous reste à faire, c'est agir.

Thunderhead cligna brièvement des yeux avant de plisser légèrement le museau et se tourner dans la direction du loup beige. N’était-il pas ce qu’il était en train de faire depuis le début ? Il veillait au bien-être de sa meute depuis le départ de son géniteur et il continuait de le faire vaillant même en ayant des rebelles dans les pattes. Soit, cela l’amusait tout de même qu’il y ait tant de récalcitrants à sa prise de pouvoir, tôt ou tard ils comprendraient que la vie dans le Nord nécessite une coopération sinon c’est la perte. Thunder’ s’ébroua la tête avant de se lécher la truffe. Il regarda de haut le Citoyen, une lueur mesquine brillant dans les yeux.

— Je vous suivrais volontiers, si ce n'était pas de la raideur de mes pattes... Je ne voudrais pas vous ralentir.

Malgré la réticence de Darjeeling, le César poursuivit son élancé.

- Les faiblesses ne sont jamais bien vues dans un territoire hostile comme celui du Nord. dit-il avant qu’un coup de vent ne vient leur fouetter le visage. Et puis… (Il regarda par-dessus son épaule) Pour agir, il est parfois nécessaire de marcher. ajouta-t-il en dévoilant les crocs avant qu’un rictus ne se peigne sur son visage. C’est drôle… Je commençais à bien apprécier le début de cette conversation, mais tes mots me laissent un arrière-goût plutôt amer… Qu’entends-tu par ce qui nous reste à faire, c’est agir ? conclut-il en penchant sa tête sur le côté, guettant les bons mots.

( suck it, other persos, darji time!
other persos:   )

— Les faiblesses ne sont jamais bien vues dans un territoire hostile comme celui du Nord, lui dit-il, avant que sa voix ne se fasse happer par une violente bourrasque qui balaya ses mèches, le forçant à se tasser sur lui-même et à incliner la tête. Fallait-il ajouter des mèches dans ses yeux en plus de son engourdissement ? Thunderhead poursuivait.

— Et puis… Pour agir, il est parfois nécessaire de marcher.
— ...  Darjeeling plissa ses paupières, protégeant ses yeux du nouveau vent. Il marchait non-loin derrière, en file, suivant la queue de son Alpha devant. Heureusement, le temps semblait clément, malgré la force du vent; aucune chance de brouillard réduisant leur visibilité. Bien sûr, ses cheveux obstruant sa vision n'étaient pas influencés par un facteur météorologique, aussi secoua-t-il la tête afin de replacer ses mèches et d'y voir un peu plus clair. Chaque pas semblait lui brûler les pattes, aussi jugea-t-il préférable d'avancer lentement, sans hâte.
— C’est drôle, poursuivit Thunderhead, un sourire malin levant ses babines. Je commençais à bien apprécier le début de cette conversation, mais tes mots me laissent un arrière-goût plutôt amer… Qu’entends-tu par ce qui nous reste à faire, c’est agir ?
— Sauf votre respect, soupira Darjeeling tout en abaissant sa tête et ses oreilles, j'ai du mal à vous suivre, César Thunderhead. Tout d'abord, l'origine de vos menaces. Il pouffa tout bas, levant un petit sourire. Allons, si vraiment ma présence dans votre promenade vous était indispensable, pourquoi ne pas m'avoir ordonné de vous suivre ? Une proposition insinue le droit au refus.

Ensuite, je crois que vous ne comprenez pas ma situation: la raideur de mes pattes m'empêche de vous suivre dans l'instant, ce qui sous-entend qu'elle est éphémère.

Enfin, je ne vois pas ce qui pourrait être ajouté, puisque nous partageons des points de vue similaires.
Il s'arrêta de marcher, fermant ses yeux, grimaçant de douleur. Il reprit la marche.
—  Aïe!... Je ne dis pas nécessairement ce vous voulez entendre, mais ce qui doit être dit. Il redressa la tête. Nous avons du temps, nous avons de l'énergie, autant les dépenser judicieusement, non ? C'est ce que je veux dire. Pour ce qui est de votre " arrière-gout ", eh bien... Je crois que ça, ça ne regarde que vous.
Il haussa les épaules.
- Désolé de vous induire à imaginer des saveurs déplaisantes ?

— Sauf votre respect, j'ai du mal à vous suivre, César Thunderhead. Tout d'abord, l'origine de vos menaces.. Allons, si vraiment ma présence dans votre promenade vous était indispensable, pourquoi ne pas m'avoir ordonné de vous suivre ? Une proposition insinue le droit au refus. Ensuite, je crois que vous ne comprenez pas ma situation: la raideur de mes pattes m'empêche de vous suivre dans l'instant, ce qui sous-entend qu'elle est éphémère. Enfin, je ne vois pas ce qui pourrait être ajouté, puisque nous partageons des points de vue similaires.

Les pas de son interlocuteur ralentirent et Thunderhead s’arrêta à son tour dans sa marche. Il tourna sa tête dans sa direction, rivant ses prunelles vairons sur Dart. Il attendit d’ailleurs que celui-ci soit à sa hauteur avant d’étirer une de ses antérieures pour lui barrer imaginairement le chemin.

- Ce n’est pas ce à quoi je faisais allusion, mais, poursuit. fit-il en relevant les yeux vers le ciel et redéposant sa patte contre le sol, il ne reprit cependant pas sa marche.

— Aïe!... Je ne dis pas nécessairement ce vous voulez entendre, mais ce qui doit être dit. Nous avons du temps, nous avons de l'énergie, autant les dépenser judicieusement, non ? C'est ce que je veux dire. Pour ce qui est de votre " arrière-gout ", eh bien... Je crois que ça, ça ne regarde que vous. Désolé de vous induire à imaginer des saveurs déplaisantes ?

Thunderhead ferma les yeux à mi-chemin du monologue de Darjeeling, songeant judicieusement à tout ce qu’il venait de lui dire.

- Bien aimable de ta part pour les excuses. fit-il en esquissant un petit sourire en coin. Et du temps et de l’énergie c’est bien précieux dans le Grand Nord. dit-il en rouvrant les yeux et les levants au ciel. Il est parfois bien difficile de savoir les dépenser de façon logique. (Pause et inspiration profonde) Pour le moment, je tâche de me concentrer sur les rations de la meute qui ont grandement diminué des suites du règne de Julius. (Il regarda de biais Dart, les paupières à demi-fermées) As-tu consulté un apothicaire pour ce problème de patte ?

— Bien aimable de ta part pour les excuses, lui dit Thunderhead, suscitant un ricanement étouffé de la part de son subalterne.
— Et du temps et de l’énergie c’est bien précieux dans le Grand Nord. Il est parfois bien difficile de savoir les dépenser de façon logique.
— Oui, c'est là qu'interviennent les dirigeants.
— Pour le moment, je tâche de me concentrer sur les rations de la meute qui ont grandement diminué des suites du règne de Julius. Lorsqu'il sentit le regard du César à nouveau sur lui, Darjeeling redressa la tête.
— As-tu consulté un apothicaire pour ce problème de patte ?
— Non. Cette blessure ne figure pas sur ma liste de priorités ... Il ne voulait pas vraiment discuter de la raideur de ses pattes. Aussi jugea-t-il bon de recommencer à marcher, tout en gardant sa posture basse, manifestant son rôle inférieur à celui de l'autre.
— Q-quoi qu'il en soit, César Thunderhead, je crains que nous ayons épuisé le sujet de la discussion. Il dressa les oreilles. Avez-vous des ordres à me donner avant que je ne vous laisse à votre promenade ?

— Non. Cette blessure ne figure pas sur ma liste de priorités ...

Thunder’ redressa sa tête sur un port altier tout en plissant les yeux voyant que Darjeeling avait froncé les sourcils face à cette question. Et tout comme, Dart, Thunderhead fronça les sourcils. Comment la santé ne pouvait-elle pas passer en priorité dans le Grand Nord ? Être en forme, en bonne santé, en possession de tous ses moyens étaient vitales dans une telle température, dans de telles conditions. Il n’était pas dupe. Il y avait quelque chose derrière cette blessure, quelque chose que le Citoyen ne voulait pas admettre et encore moins en présence de son supérieur.

Sans plus attendre, le loup crème poursuivit sa marche comme pour convaincre l’autre que cela n’était pas des plus graves, des plus prioritaires. Le Tyran l’observa avancer de quelques pas avant de plonger dans sa piste.

— Q-quoi qu'il en soit, César Thunderhead, je crains que nous ayons épuisé le sujet de la discussion.

Thunderhead émit un rictus, tout en fermant les yeux. La simple hésitation de Dart avait de quoi l'intriguer.

- Pas tout à fait. fit-il tout bas.

- Avez-vous des ordres à me donner avant que je ne vous laisse à votre promenade ?

- Oui. fit-il sèche, d’un trait. Dit moi… Si cette blessure n’est pas une priorité, qu’elle est telle ? D’où viens-t-elle ? exigea-t-il en dardant de biais ses prunelles vairons sur la silhouette de Dart.

— Oui.
—  Je vous écoute.
— Dit moi… Si cette blessure n’est pas une priorité, qu’elle est telle ? D’où viens-t-elle ?
— .. ....
Darjeeling ne pouvait s'empêcher de se maudire intérieurement. Il darda Thunderhead du même regard avant de s'avouer vaincu en poussant un soupir et en levant les yeux au ciel, affaissant ses épaules. À défaut de pouvoir lui dire toute la vérité, il pouvait au moins lui exposer les faits afin de lui épargner tout ce souci.
— ... Je me suis blessé en venant sur ce plateau. répondit le citoyen en fermant les yeux. Il les rouvrit, regardant ailleurs, mesurant ses mots. Plus exactement, en creusant dans la neige. À force de creuser , il poursuivit, mes pattes fatiguent. C'est pourquoi elles deviennent raides lorsque j'arrête.
Il leva un sourire résigné.
— Vous voyez ? Ce n'est rien. Du moins, rien qui nécessite d'aller voir un apothicaire, je pense.

— .. ....

Ce silence rendait tout son sens. Dart soupira. Il était vaincu. Il ne pourrait pas cacher son secret bien longtemps en présence de son César. Thunderhead était bien trop avide de curiosité pour laisser couler cette histoire. Il avait à cœur le sort de cette meute. Il faisait des pieds et des mains pour rétablir un ordre vivable, un état dans lequel tout le monde pouvait survivre à condition que tous y mette du sien. Pour cela il ne fallait pas devenir une nuisance. Les loups blessés sévèrement ne pouvaient être sauvés dans ces conditions si rigides et sévères. La température ou encore les rations sévères de nourritures venaient toujours à bout d’eux. Ce pourquoi, une simple valait bien une visite chez un apothicaire.

Thunder’ ne mettait toutefois pas en doute les dires de Darjeeling. Il fallait être bien bête pour se blesser et se refuser à avoir des soins au risque de mettre sa vie en péril. Donc, pourquoi ne pas y aller ? Qu’était cette blessure ? C’était curieux.

Le loup caramel fit un pas vers le loup crème et pencha légèrement sa tête sur le côté, dressant hautement les oreilles.

- Je t’écoute. dit-il en le regardant de biais, impatient.

— ... Je me suis blessé en venant sur ce plateau. Plus exactement, en creusant dans la neige. À force de creuser mes pattes fatiguent. C'est pourquoi elles deviennent raides lorsque j'arrête.

Le Tyran recula légèrement sa tête dans les épaules. Les explications étaient claires et avaient du sens, sa lui faisaient

— Vous voyez ? Ce n'est rien. Du moins, rien qui nécessite d'aller voir un apothicaire, je pense.

Thunder’ afficha un léger rictus, amusé.

- En effet… fit-il en baissant la tête et fermant les yeux. Je te laisse juger par moi-même, mais j’espère qu’aucun Légionnaire ne viendra pas me prévenir que soudainement un Citoyen ne marche plus. rajouta-t-il en rouvrant les yeux, dardant ceux-ci dans ceux de Dart. En attendant… (Il tourna les talons et avança de quelques pas en trottant) Si tu n’as rien d’autre à ajouter, j’aurais besoin d’un coup de patte pour remplir le garde-manger de petites proies (Il regarda par-dessus son épaule, un sourire en coin) Si tu en es toujours capable, bien entendu.