Enflure de vie.

Encore une fois, Raven était en colère. Très en colère. Encore en colère contre les loups de son Clan, encore en colère contre la vie, encore en colère contre ces foutus connards de loups qui pensaient leur temps à se moquer de lui, mais il était par dessus tout en colère contre lui. Lui ne méritait pas de vivre, lui ne méritait pas d'avoir de l'affection de la part de sa mère et de Seta. Alors que sa mère l'avait abandonnée. Il n'avait même pas mérité de naître. Il ne méritait rien de tout ce qu'il avait eut jusqu'à présent. Et il ne méritait pas tout ce qu'il aurait de bien dans son futur. Lui qui n'était qu'une erreur, qu'un renard. Il était sali des misères du monde, le monde était sali de ses propres misères. Raven détestait le monde et se détestait lui aussi. Il détestait sa vie. Il détestait tout ce qui l'entourait et tout ceux qui l'entouraient.
Sauf une seule personne.
Seta. Son petit éclat de diamant pur. Son trésor le plus précieux contre lequel il ne pouvait pas se mettre en colère. Il se sentait comme une flamme ardente quand quelqu'un osait s'approcher d'elle. Pourtant, il était plus pourrit que les autres encore.

Là bas, il y avait le Séquoia. Et au Séquoia, il trouverait de quoi passer ses nerfs. La première personne qu'il verrait et contre qui il pouvait hurler, déverser toute sa haine. Raven s'en prenait toujours aux autres parce que les autres s'en prenaient toujours à lui. Même les innocents s'en prenaient à lui. Le monde s'en prenait à lui. Mais il le méritait. Et le monde méritait que Raven s'en prenne à lui.
Coup de chance aujourd'hui, son chemin vint percuter celui d'un loup. Percuté au sens propre: Raven lui avait foncé dedans sans même le voir. Quand il reprit pieds à terre, il avait reconnu l'être infâme qui se tenait devant lui: c'était Bokan, le prisonnier d'Alteron. Encore une victime de la vie, et encore un meurtrier du monde. Raven explosa:
- GROS CON !! Hurla-t-il de sa voix perchée et rauque. PUTAIN, TU PEUX PAS REGARDER OU TU VAS ?! SÉRIEUSEMENT ! Il était hérissé, en colère mais en même temps mal à l'aise. Alors il reprit de plus bel: ENFLURE, POURQUOI TU ME R'GARDES ?! C'PA'CE'QUE CHUIS UN RENARD C'EST CA ?! TOI AUSSI TU VAS TE FOUTRE DE MA GUEULE ?! HEIN ?!! TOI AUSSI TU VAS ME CONSIDÉRER COMME DIFFÉRENT SOUS PRÉTEXTE QUE J'SUIS PETIT ET QUE J'AI UN SALE CARACTÈRE, HEIN ?!!

Fou de rage. Raven était fou de Rage.

Tandis que Raven bouillonnait, soufflait du nez, la queue dressée et hérissée, les crocs dévoilés et les oreilles dans le cran, le prisonnier -qui était couché- le regarda en haussant simplement les sourcils, ce qui fit rager Raven encore plus. Il n'avait qu'une envie: lui sauter dessus pour le mordre.
- Qu'avons nous là ?
Et il avait l'audace de poser cette question. Raven laissa échapper un nouveau grondement de rage. Sa gorge en trembla de fureur, ses iris vibraient tant il était en colère.
J'vais lui faire péter ses dents !!
- Hmmmmm...
L'air de réfléchir de cet abruti bleu enragea encore plus Raven qui claqua des mâchoires, menaçant. Même s'il n'avait strictement aucune chance contre lui, Raven trouverait le moyen de lui faire payer tout les malheurs de son propre monde.
- T'es vachement en colère en tout cas. Enfin, je crois. Moi jsuis bleu et j'en fais pas tout un plat hein.
De nouveau, Raven explosa:
- J'M'EN FOU DE TOI ! TOI, T'ES COMME LES AUTRES ! T'ES QU'UN CONNARD ! VOUS ÊTES TOUS DE CONNARDS, DANS CETTE MEUTE !!
Le renard grogna de plus belle, plus en colère qu'il ne l'était encore. Si, si, il pouvait être encore plus en colère. La voix de Raven était forte, il savait la faire monter très très haut sans passer dans les aigus et sans jamais se la fatiguer.
Mais bon sang, qu'il détestait sa voix et ceux qui pouvaient l'entendre.
Raven gronda de nouveau. Pour l'instant, il avait besoin de se défouler. Vraiment. Il avait accumulé bien trop de haine et bien trop de hargne pour son pauvre petit corps défaillant. Il lui fallait vider son sac, hurler à plein poumons même si sa maladie commençait peu à peu à prendre de la place en lui et à compresser sa cage thoracique.
Cette foutue maladie. Elle aussi, elle lui pourrissait la vie. Et dans quelques années, elle serait son bourreau.
De nouveau, il recommença à hurler:
- VOUS AVIEZ RIEN DANS L’CRANE. VOUS COMPRENEZ PAS CE QUI SE PASSE AUTOUR DE VOUS !! VOUS ÊTES TOUS QUE DES... DES ÉGOÏSTES PURS ET DURS !! Vous restez tous impassible au sort des autres, de ce qui vous entour ! VOUS POUVEZ QUE RIRE DES GENS ! VOUS POUVEZ QUE VOUS MOQUER DU MALHEUR DES AUTRES ET DU MALHEUR DE TOUTE LA TERRE !! Mais au fond... C'EST VOUS LE MALHEUR ! ET MOI AUSSI, J'SUIS COMME VOUS !! J'SUIS UN MALHEUR !
Il n'y avait aucune raison qu'il déballe ça, tout à coup. Il ne se visait même pas en parlant de l'égoïsme. La plus part des gens ignoraient sa maladie. Il parlait en désignant le général.
Il fut essoufflé d'avoir hurlé autant. Tout ce qu'il aurait besoin aurait été du réconfort de Seta. De sa présence pure et étincelante.